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La tension entre l'exigence de sécurité (aujourd'hui l'efficacité dans la lutte contre le terrorisme) et celle de protéger les libertés n'a jamais été autant au centre du débat démocratique. Cette tension nous interpelle plus que jamais à l'aune des attentats intervenus et des menaces qui pèsent aujourd'hui sur la France. La France a pris un virage sécuritaire qui s'est accéléré depuis les attentats de Charlie Hebdo à tel point que son arsenal juridique est considéré comme l'un des plus répressif en Europe.
Certains y voient un sacrifice sournois et à peine dissimulé des libertés publiques au nom de l'exigence de parer à la menace terroriste et même, l'instauration d'une forme d'Etat d'exception latent. L'ambition de ce livre n'est évidemment pas de se substituer aux autorités, mais de façon rigoureuse, d'apprécier si ces dérogations au droit commun, au travers de différentes trajectoires et les conditions dans lesquelles elles ont été mises en œuvre, peuvent être considérées comme équilibrées au regard des objectifs affichés et proportionnées au regard des menaces qu'elles font peser sur les libertés publiques.
C'est ainsi que ce livre traversera le destin individuel de ceux qui ont fait l'objet d'une déchéance de nationalité, d'assignation à résidence ou tout simplement de justiciables poursuivis dans le cadre d'une procédure de droit commun contaminée progressivement par un droit d'exception notamment sur le droit à la liberté d'expression. Sera également évoqué l'impact pour les citoyens de l'élargissement des pouvoirs des services de renseignement.
RECOMMANDÉ PAR CULTURE-CHRONIQUE
La France connait le terrorisme sur son territoire depuis des décennies mais les massacres qui ont ensanglanté la France depuis 2015 ont poussé nos dirigeants à activer l’Etat d’Urgence qui est une possibilité constitutionnelle. Il ne se résume pas simplement à une affaire de normes, de lois, c’est aussi un état d’esprit. Le risque qu’il comporte est évidemment d’accorder un blanc-seing à l’Etat, dont chacun pourrait rêver qu’il deviennent le bouclier pour éviter de nouveaux massacres.
William Bourdon est avocat au Barreau de Paris. Il a mis son expertise au service des droits de l’homme en servant la cause des victimes de Pinochet au Chili et celles du génocide au Rwanda. Cette fois à travers son ouvrage “Les dérives de l’état d’urgence” il examine si les dérogations au droit commun peuvent être considérées comme équilibrées au regard des objectifs affichés et proportionnés relativement aux menaces qu’elles font peser sur les liberté publique.
Le terrorisme d’aujourd’hui, par sa dimension hyper nihiliste, déconnecté de toute potentialité de négociations pour y mettre fin, constitue le grand défi pour les démocraties modernes en ce début du XXIème siècle. L’ouvrage explore les effets du virage brutal opéré par la France à l’issue des terribles attentats qui l’ont endeuillée et obscurcie, et qui porte en lui des dérives qui seraient autant de germes d’un glissement progressif vers un Etat d’exception permanent en raison de la persistance de menaces terroristes. A ce titre Bourdon pointe l’une des dimensions perverses du terrorisme, celle qui consiste à mettre le ver dans la pomme en corrompant l’Etat. En effet les effets délétères d'actions terroristes renouvelées vont introduire progressivement une modification durable de sa politique pénale en déhiérarchisant les valeurs, les principes et les priorités.
“Les dérives de l’état d’urgence” est à la fois un livre d’actualité mais aussi une réflexion historique sur la contamination de la loi par le phénomène viral que constitue le terrorisme. William Bourdon nous propose une réflexion rigoureuse qui s'interroge sur les hésitations de l’autorité judiciaire et en particulier sur la place du juge administratif qui subit un véritable effacement en ces temps incertains. Un travail exigeant et nécessaire pour conserver à notre démocratie toute la lucidité qu’elle doit nourrir à son propre égard.
Archibald PLOOM (CULTURE-CHRONIQUE.COM)