-
souvenirs
-
belle écriture
-
Vercors- Petit Louis
-
écrivain à relire
Le petit Louis. Vercors
Éditions Portaparole
« C’est agaçant vraiment d’être appelé Petit Louis, comme si petit on l’était pour la vie. »
Le garçon qui parle c’est l’écrivain-résistant Vercors ( Le silence des armes.) Il nous emmène en enfance à travers des pages non éditées auparavant mais présentées par Portaparole avec la voix juste de Alain Riffaud. Une enfance, où l’auteur évolue dans une France bourgeoise du début de l’autre siècle avec son bien-être familial fragile et les déplacements réguliers de la famille dans des maisons différentes où
l’enfant est heureux.
Le Petit Louis n’est autre que Jean qui a changé son nom pour le récit. Une nuit, lassé de cette appellation de « Petit Louis », il s’en va réveiller son oncle et sa tante pour leur confier tout de go : … « Eh bien, je venais vous dire…vous dire, moi, vous savez, je grandis. Mais je grandis doucement. » Le souci était résolu. Et Louis-Jean, aux côtés de sa sœur Mado-Denise, va bâtir, pour après, avec elle, l’immense maison des souvenirs.
Le livre offre, avec les illustrations délicates de Pascal Mariette en regard, une observation de la vie, détaillée au quotidien par le garçon qui grandit en effet. Une compréhension fine de ce quotidien fait de va-et-vient dans les familles ou encore des relations avec les autres qui se trouvent moins à l’abri du siècle ; ainsi cette image du vieux musicien raté sur laquelle s’attarde le garçon ; le remords qui en découle de ne pas avoir vu son père ouvrir sa porte à l’artiste qui avait faim.
Clichés de vie savoureux où les visions du train dans la neige changent de sensations et de couleur suivant le numéro de manuscrit que rédige l’auteur; celles des rassemblements de famille où l’on sent palpiter le secret, celles encore des portraits ciselés comme celui du docteur Timmermans. Rappel aussi en touches pudiques des mensonges de maman au sujet de la colère du père, des petits sous qui manquent pour l’achat du scaphandrier du Grand Bazar, de la maladie qui rôde…
Images jaunies par le temps mais portées par l’écriture superbe et sensible de Jean Bruller dit Vercors.
L’auteur n’a que vingt ans quand meurt Marcel Proust mais des intonations de l’œuvre de ce dernier se révèlent assurément dans celle de Bruller ; sans plagiat aucun pourtant, seulement la même appréhension du vécu, visions subtiles de ceux qui ont aimé et longuement observé en aimant…
L’extrait parle de lui-même :
« … D’une main, elle retenait son chapeau perché sur l’énorme chignon, de l’autre elle engageait l’épingle, et tâtonnant longuement d’un air songeur et concentré, l’endroit où la faire passer. Puis, l’ayant trouvé, poussait l’épingle d’un seul coup. J’en avais conclu qu’elle cherchait le trou…L’existence d’un trou naturel pour épingles à chapeaux dans le crâne des dames n’avait pour moi rien de spécialement étrange puisque les femmes avaient aussi dans les oreilles des trous pour passer les boucles. »
Un choix réussi de la maison d’éditions d’Arles Portaparole. À lire et à offrir ad libitum, comme une pièce musicale sensible.
Élisabeth Fabre Groelly. 2021
Une belle lecture-souvenir
Le petit Louis. Vercors
Éditions Portaparole
« C’est agaçant vraiment d’être appelé Petit Louis, comme si petit on l’était pour la vie. »
Le garçon qui parle c’est l’écrivain-résistant Vercors ( Le silence des armes.) Il nous emmène en enfance à travers des pages non éditées auparavant mais présentées par Portaparole avec la voix juste de Alain Riffaud. Une enfance, où l’auteur évolue dans une France bourgeoise du début de l’autre siècle avec son bien-être familial fragile et les déplacements réguliers de la famille dans des maisons différentes où l’enfant est heureux.
Le Petit Louis n’est autre que Jean qui a changé son nom pour le récit. Une nuit, lassé de cette appellation de « Petit Louis », il s’en va réveiller son oncle et sa tante pour leur confier tout de go : … « Eh bien, je venais vous dire…vous dire, moi, vous savez, je grandis. Mais je grandis doucement. » Le souci était résolu. Et Louis-Jean, aux côtés de sa sœur Mado-Denise, va bâtir, pour après, avec elle, l’immense maison des souvenirs.
Le livre offre, avec les illustrations délicates de Pascal Mariette en regard, une observation de la vie, détaillée au quotidien par le garçon qui grandit en effet. Une compréhension fine de ce quotidien fait de va-et-vient dans les familles ou encore des relations avec les autres qui se trouvent moins à l’abri du siècle ; ainsi cette image du vieux musicien raté sur laquelle s’attarde le garçon ; le remords qui en découle de ne pas avoir vu son père ouvrir sa porte à l’artiste qui avait faim.
Clichés de vie savoureux où les visions du train dans la neige changent de sensations et de couleur suivant le numéro de manuscrit que rédige l’auteur; celles des rassemblements de famille où l’on sent palpiter le secret, celles encore des portraits ciselés comme celui du docteur Timmermans. Rappel aussi en touches pudiques des mensonges de maman au sujet de la colère du père, des petits sous qui manquent pour l’achat du scaphandrier du Grand Bazar, de la maladie qui rôde…
Images jaunies par le temps mais portées par l’écriture superbe et sensible de Jean Bruller dit Vercors.
L’auteur n’a que vingt ans quand meurt Marcel Proust mais des intonations de l’œuvre de ce dernier se révèlent assurément dans celle de Bruller ; sans plagiat aucun pourtant, seulement la même appréhension du vécu, visions subtiles de ceux qui ont aimé et longuement observé en aimant…
L’extrait parle de lui-même :
« … D’une main, elle retenait son chapeau perché sur l’énorme chignon, de l’autre elle engageait l’épingle, et tâtonnant longuement d’un air songeur et concentré, l’endroit où la faire passer. Puis, l’ayant trouvé, poussait l’épingle d’un seul coup. J’en avais conclu qu’elle cherchait le trou…L’existence d’un trou naturel pour épingles à chapeaux dans le crâne des dames n’avait pour moi rien de spécialement étrange puisque les femmes avaient aussi dans les oreilles des trous pour passer les boucles. »
Un choix réussi de la maison d’éditions d’Arles Portaparole. À lire et à offrir ad libitum, comme une pièce musicale sensible.
Élisabeth Fabre Groelly. 2021