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Le goût pour la Chine, qui passionne l'Europe sans discontinuer de la fin du XVIIe siècle à la Révolution, voit se succéder la mode des cabinets de porcelaine, celle des céramiques ornées d'inventives montures de bronze doré rocaille, puis néo-grecques, celle des chinoiseries rococo à la Boucher et, finalement, celle des jardins anglo-chinois peuplés de pavillons et pagodes à l'architecture inspirée par l'Empire céleste.
Cette recherche d'évasion vers un Orient lointain et fantasmé trouve un écho particulièrement abouti à Saverne, où le cardinal de Rohan, grand aumônier de France et prince-évêque de Strasbourg, initie un fastueux programme de reconstruction de son château de campagne anéanti par un incendie en 1779. La vaste résidence néoclassique conçue d'après les plans de Nicolas Alexandre Salins de Montfort est, en effet, complétée par un monumental kiosque chinois du même architecte.
II s'agit de l'une des réalisations les plus originales parmi ces extravagantes " fabriques " commanditées pour l'agrément des jardins des résidences souveraines et aristocratiques, où la fascination pour l'exotisme trouvait son terrain de prédilection. A la même époque, le cardinal réunit un spectaculaire ensemble d'objets d'Extrême-Orient dont certaines pièces sont dignes de figurer dans une demeure royale.
Fondée sur un principe de série et de monumentalité se démarquant étonnamment des collections du temps, celle du prince-évêque n'a jamais été démantelée. Déclarée bien national par les commissaires de la Révolution et transférée en 1793 du château de Saverne au Muséum départemental de Strasbourg, elle constitue, au sein du musée des Arts décoratifs, depuis les années 1930, une évocation tangible de ce que fut au XVIIIe siècle le goût pour la Chine.