« Qui sait si cette autre moitié de la vie où nous pensons veiller n'est pas un autre sommeil un peu différent du premier, dont nous nous éveillons quand nous pensons dormir ? Et qui doute que si on rêvait en compagnie et que par hasard les songes s'accordassent, ce qui est assez ordinaire, et qu'on veillât en solitude, on ne crût les choses renversées ? ».(Pascal, Pensées).
Ellen est spécialiste du sommeil, lors d'une insomnie, - tout en déroulant une réflexion sur l'histoire culturelle du sommeil -, elle se souvient de son passé, et de la disparition non résolue du père
de sa
fille Olga. Par ailleurs nous suivons un messager postal, Andreas, qui conserve les signes perdus, et trouve un cahier vert, journal de chorale de Marthe que nous lirons en interlude de chacun des chapitres du roman. Ce dernier est donc composé de plusieurs couches indépendantes, elles suivent leur cour, mais au fil de la lecture elles semblent se rejoindre. Les souvenirs sont pareil au sommeil, on y descend comme au fond d'un lac, on tente d'atteindre un secret enfoui,et la pression se fait de plus en plus insistante à mesure qu'on prend de la profondeur et que le mystère se dévoile peu à peu. « Le sommeil est-il le gardien du rêve ou est-ce le rêve qui est le gardien du sommeil ? Si le sommeil est plus proche de la vie que la mort, l'état d'éveil ; l'accession à la pleine et entière conscience est plus proche de la mort que de la vie. Éveil, fatigue, somnolence, toutes les différences semblent se fluidifier. Les pensées liquides deviennent des rêves deviennent des plantes subaquatiques arrachées ». Cette vision très platonicienne de la conscience met l'accent sur le thème central du roman : la disparition que l'on retrouve dans le fait de dormir,
d'oublier (la mère d'Ellen est emportée par la maladie d'Alzheimer), de disparaître aux yeux des autres suivant différentes modalités, physiques ou mentales. Mourir, se réveiller... On se perd un peu dans les méandres du roman, c'est un peu comme quand on ouvre les yeux sous l'eau.: « Il y a une araignée d'eau qui, lorsque vient l'hiver, se cherche un coquillage vide au fond du lac et le remplit de son souffle jusqu'à ce que le coquillage devienne tout léger. Ensuite elle tisse une toile à
l'entrée du coquillage, se laisse remonter vers la surface, se met en hibernation et dort jusqu'au printemps. Mais en fin de compte, cette araignée est un animal terrestre qui passe toute sa vie sous l'eau, dans une cloche de plongée. Est-ce singulier ou juste triste ? ».
Vom Schlafen und Verschwinden
« Qui sait si cette autre moitié de la vie où nous pensons veiller n'est pas un autre sommeil un peu différent du premier, dont nous nous éveillons quand nous pensons dormir ? Et qui doute que si on rêvait en compagnie et que par hasard les songes s'accordassent, ce qui est assez ordinaire, et qu'on veillât en solitude, on ne crût les choses renversées ? ».(Pascal, Pensées).
Ellen est spécialiste du sommeil, lors d'une insomnie, - tout en déroulant une réflexion sur l'histoire culturelle du sommeil -, elle se souvient de son passé, et de la disparition non résolue du père de sa
fille Olga. Par ailleurs nous suivons un messager postal, Andreas, qui conserve les signes perdus, et trouve un cahier vert, journal de chorale de Marthe que nous lirons en interlude de chacun des chapitres du roman. Ce dernier est donc composé de plusieurs couches indépendantes, elles suivent leur cour, mais au fil de la lecture elles semblent se rejoindre. Les souvenirs sont pareil au sommeil, on y descend comme au fond d'un lac, on tente d'atteindre un secret enfoui,et la pression se fait de plus en plus insistante à mesure qu'on prend de la profondeur et que le mystère se dévoile peu à peu. « Le sommeil est-il le gardien du rêve ou est-ce le rêve qui est le gardien du sommeil ? Si le sommeil est plus proche de la vie que la mort, l'état d'éveil ; l'accession à la pleine et entière conscience est plus proche de la mort que de la vie. Éveil, fatigue, somnolence, toutes les différences semblent se fluidifier. Les pensées liquides deviennent des rêves deviennent des plantes subaquatiques arrachées ». Cette vision très platonicienne de la conscience met l'accent sur le thème central du roman : la disparition que l'on retrouve dans le fait de dormir,
d'oublier (la mère d'Ellen est emportée par la maladie d'Alzheimer), de disparaître aux yeux des autres suivant différentes modalités, physiques ou mentales. Mourir, se réveiller... On se perd un peu dans les méandres du roman, c'est un peu comme quand on ouvre les yeux sous l'eau.: « Il y a une araignée d'eau qui, lorsque vient l'hiver, se cherche un coquillage vide au fond du lac et le remplit de son souffle jusqu'à ce que le coquillage devienne tout léger. Ensuite elle tisse une toile à
l'entrée du coquillage, se laisse remonter vers la surface, se met en hibernation et dort jusqu'au printemps. Mais en fin de compte, cette araignée est un animal terrestre qui passe toute sa vie sous l'eau, dans une cloche de plongée. Est-ce singulier ou juste triste ? ».