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En publiant L'Homme spéculaire (1990), Richard Rorty a provoqué une fracture fondamentale dans la philosophie : elle était le maniement d'un miroir pour y contempler la nature et l'humanité, leurs essences et leurs finalités. Ce miroir nous berçait d'illusions, il est aujourd'hui brisé. Deux thèmes s'entremêlent ici pour présenter ce pragmatiste de renommée mondiale (il a été traduit en plus de 25 langues) : celui de l'autocréation de l'individu par la pratique de l'ironie philosophique envers la connaissance de soi et de tout ce qui peut nous définir, et celui de la manière dont l'individu contribue au façonnage de la société en coopérant à des actions convergentes : la solidarité.
Cette ironie est proche d'un scepticisme se méfiant des mots qui ne peuvent jamais remplacer ce qui est vécu, elle s'apparente au regard créatif des artistes, elle dynamise la représentation de soi dans la réflexion morale. Et notre insertion sociale est à construire par la recherche d'une solidarité entre tous ceux qui rejettent l'humiliation de l'homme par l'homme et qui se voient ainsi méprisés par les nostalgiques du passé.
Richard Rorty réaffirme avec plus d'exigences le rôle essentiel des philosophes pour l'épanouissement des individus et des sociétés. Pour lui, la Philosophie avec majuscule doit être abandonnée et les philosophes doivent retourner sur la place du marché. Son pragmatisme est ainsi une philosophie fondée sur la pratique d'une pensée pour l'émancipation des citoyens dans des démocraties cultivant la créativité, le savoir, le respect et le dialogue.
