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Les femmes furent presque totalement absentes des trois
premiers milliers d'années de l'écriture, Dans le millénaire qui
suivit, d'abord dans la grande Grèce, puis dans le monde
gréco-romain, il y eut au moins des poétesses, mais on n'en
conserva que quelques noms. Même d'une Aspasie dont on
sait qu'elle fut une philosophe importante, il ne reste rien de ce
qu'elle a pu écrire. Et de la seule Sappho, illustre dès son
temps, ne restent que quelques poèmes et des fragments.
Les
siècles de rechute dans la barbarie firent taire à nouveau les
femmes. Enfin, à partir du 10e siècle japonais et du 12e de
notre Occident, des œuvres de femmes apparaissent dans ce
que Michel Lequenne appelle des "oasis du temps", comme
"ces fleurs superbes qui éclosent et s'épanouissent sur le sol
ingrat des pentes rocheuses, voire volcaniques". En Europe, ce
n'est qu'à la fin du Moyen Age que les femmes vont dépasser
la seule altérité littéraire en un mouvement ininterrompu vers
ce qui va devenir le féminisme, s'affirmant ainsi comme cette
moitié de l'humanité sans laquelle l'humanisation de l'espèce
né pourrait se réaliser.
Il s'agit donc d'une partie de l'histoire
de la pensée qui jusqu'ici n'a guère été considérée en tant que
telle. Le premier tome s'arrête à la fin du 18e siècle, alors que
les femmes ont commencé à assurer une large présence à leur
écriture, et à la veille de la Révolution française qui va non
seulement bouleverser toute l'Europe, mais ouvrir l'essor
bourgeois-capitaliste. Le deuxième tome sera consacré aux
deux siècles où l'alphabétisation se généralisera, où la culture
s'étendra progressivement aux classes populaires, d'abord aux
hommes, puis aux femmes, lesquelles ne vont plus cesser de
lutter pour leur égalité sociale avec eux, et donner en deux
siècles plus de Grandes Dames des lettres qu'en tous les
siècles précédents.