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Elle, c'est la Mère, La Mère Nourricière. Et eux, ses enfants. Elle en a six cents, sans compter ceux qui sont partis. Ouvriers, ingénieurs, travailleurs ardents. Plus ou moins beaux, plus ou moins doués, comme tous les enfants d'une même portée. On l'appelle La Mère SINOC : Société Industrielle Nautique d'Objets Culbuto. Elle fabrique des ustensiles de plaisance qui ont la particularité de ne jamais se renverser en mer, même en cas de tempête.
La Mère SINOC fait vivre toute La ville. Ses enfants lui doivent tout. Elle leur a tout donné. Du même coup, elle ne Leur pardonne rien. C'est ainsi : même avec eux, il lui arrive d'être arbitraire et injuste. C'est probablement le danger des familles trop nombreuses... Ce roman musical, écrit par Arnaud Cathrine et Florent Marchet, se décline en dix-neuf tableaux et autant de chansons.
Frère Animal de Florent Marchet et Arnaud Cathrine
J’adore Florent Marchet ; je le considère comme l’un des chanteurs français contemporains les plus brillants de sa génération, tant pour ses paroles que pour ses arrangements d’orfèvre. J’aime aussi beaucoup Arnaud Cathrine et sa prose mélancolique et poétique... Du coup, je ne pouvais qu’être séduit d’emblée par ce projet réunissant les deux artistes amis, une sorte de roman musical écrit et composé à quatre mains !
Alors, qu’en est-il vraiment de ce "Frère Animal" ? Il s’agit d’un conte contemporain mettant en scène une entreprise tentaculaire, la SINOC. On est ému d’abord par les parcours des différents salariés de la firme : Jean, le père, pour qui le métier constitue toute sa vie ; Maxime, "le vieil enfant" qui est rejeté par l’entreprise en raison de son âge ; Thibaut, le fils, un jeune idéaliste révolutionnaire qui s’oppose en bloc aux valeurs de l’entreprise ; Renaud, le jeune cadre dynamique ambitieux qui gravit progressivement les échelons au sein de l’entreprise ; le DRH, personnage froid et cynique faisant froid dans le dos… Surtout, on est surpris par la cruauté et la noirceur que dégage le texte : la Mère SINOC apparaît comme une industrie totalitaire et carcérale, ayant une emprise complète sur l’existence de ses protégés complètement aliénés. Je n’ai pas encore mentionné la musique : sublime, envoutante, qui se teinte de mélodies pop et rock, mais qui reste discrète pour laisser s’épanouir pleinement le texte.
Il s’agit d’un roman à la fois amer et émouvant, un récit engagé qui nous fait réfléchir sur la place de l’entreprise et du travail dans nos vies.