Il est des grands hommes qui recherchent la postérité et d’autres qui consacrent toute leur énergie au bien public. Napoleon appartient à la première catégorie et François Denis Tronchet à la seconde. L’histoire est cruelle, elle retient certains noms et en oublie d’autres. Philippe Tessier répare avec cette biographie l’une de ces injustices historiques communes : l’oubli d’un homme qui pourrait pourtant être cité comme exemplaire. Tronchet est devant l’histoire le miroir inversé de Talleyrand : tous deux traversèrent parmi les moments les plus agités de l’histoire
de France sans jamais sombrer mais l’évêque d’Autun est resté depuis au coeur de la mémoire nationale tandis que l’homme de loi n’est plus connu que par les étudiants des facultés de droit quand son nom est donné à l’une de leurs salles de cours.
Pourtant François Denis Tronchet joua un rôle considérable dans l’élaboration du droit révolutionnaire et plus tard du code civil sans que personne ne semble aujourd’hui - hormis quelques spécialistes du droit français – s’en souvenir.
Comme le souligne Philippe Tessier, François Denis Tronchet est né dans une famille appartenant à la “basoche” , coeur de la bourgeoisie traditionnelle parisienne liée à l’exercice des fonctions juridiques par le Parlement et les autres juridictions. Son père Charles Tronchet était procureur au parlement de Paris. De son côté François Denis, né en 1726, étudiera avec soin tous les droits de son époque. Il commença sa carrière en 1745 en tant qu’avocat. Dès le milieu des années 1760, son prestige l’avait agrégé à l’élite du barreau. Il sera pendant près de quarante années avocat au Parlement de Paris et en 1789 son prestige le porte à l’Assemblée en tant que député.
Il a 63 ans au début de la Révolution et l’historien nous permet de suivre les transformations qu’il subit du fait de l’impact des transformations de la révolution sur le droit. Tronchet s’efforce de réaliser, grâce à son extraordinaire créativité juridique, une synthèse, ou plutôt une intégration de la nouveauté, de principes inédits, telle par exemple l’égalité, dans la tradition qu’il connait, qu’il sait rappeler, voire parfois déformer. Il est partisan de l’égalité et devenu législateur il s’inspire des coutumes égalitaires des régions françaises. C’est à lui que les Français et surtout les Françaises doivent l’égalité des enfants dans la succession des parents en rupture avec le droit d’aînesse. Sur le plan politique, c’est l'homme de l’extrême centre, il a toujours refusé les attaques personnelles ou les règlements de comptes brutaux Il s’occupera en 1792 de la défense de Louis XVI qu’il assurera avec brio malgré le danger que recelait cette fonction.
En 1804 – il a alors 78 ans – il devient président de la commission de rédaction du Code Civil. Tronchet était partisan de l’unification de la nation par la loi et il soutient que le Code Civil devait être le même pour tous les français, et il l’emporta contre Portalis qui s’opposait à une régime matrimonial unique par défaut. Par ailleurs Tronchet souhait que le Code Civil dure, il devra donc être composé de définitions claires et simples, afin d’être accessible à tous et donc plus démocratique.
Tronchet fut donc clairement l’une des sources vives d’un droit au contenu nouveau et unificateur à la chute de l’ancien Régime, conçu à partir de sa pratique du droit ancien. Quand il meurt en 1806, il est inhumé au Panthéon, ce qui en dit long sur l’opinion que ses contemporains avaient de lui. C’est à la vertu de l’ouvrage de Philippe Tessier de nous en faire redécouvrir les raisons.
Archibald PLOOM (CULTURE-CHRONIQUE.COM)
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Il est des grands hommes qui recherchent la postérité et d’autres qui consacrent toute leur énergie au bien public. Napoleon appartient à la première catégorie et François Denis Tronchet à la seconde. L’histoire est cruelle, elle retient certains noms et en oublie d’autres. Philippe Tessier répare avec cette biographie l’une de ces injustices historiques communes : l’oubli d’un homme qui pourrait pourtant être cité comme exemplaire. Tronchet est devant l’histoire le miroir inversé de Talleyrand : tous deux traversèrent parmi les moments les plus agités de l’histoire de France sans jamais sombrer mais l’évêque d’Autun est resté depuis au coeur de la mémoire nationale tandis que l’homme de loi n’est plus connu que par les étudiants des facultés de droit quand son nom est donné à l’une de leurs salles de cours.
Pourtant François Denis Tronchet joua un rôle considérable dans l’élaboration du droit révolutionnaire et plus tard du code civil sans que personne ne semble aujourd’hui - hormis quelques spécialistes du droit français – s’en souvenir.
Comme le souligne Philippe Tessier, François Denis Tronchet est né dans une famille appartenant à la “basoche” , coeur de la bourgeoisie traditionnelle parisienne liée à l’exercice des fonctions juridiques par le Parlement et les autres juridictions. Son père Charles Tronchet était procureur au parlement de Paris. De son côté François Denis, né en 1726, étudiera avec soin tous les droits de son époque. Il commença sa carrière en 1745 en tant qu’avocat. Dès le milieu des années 1760, son prestige l’avait agrégé à l’élite du barreau. Il sera pendant près de quarante années avocat au Parlement de Paris et en 1789 son prestige le porte à l’Assemblée en tant que député.
Il a 63 ans au début de la Révolution et l’historien nous permet de suivre les transformations qu’il subit du fait de l’impact des transformations de la révolution sur le droit. Tronchet s’efforce de réaliser, grâce à son extraordinaire créativité juridique, une synthèse, ou plutôt une intégration de la nouveauté, de principes inédits, telle par exemple l’égalité, dans la tradition qu’il connait, qu’il sait rappeler, voire parfois déformer. Il est partisan de l’égalité et devenu législateur il s’inspire des coutumes égalitaires des régions françaises. C’est à lui que les Français et surtout les Françaises doivent l’égalité des enfants dans la succession des parents en rupture avec le droit d’aînesse. Sur le plan politique, c’est l'homme de l’extrême centre, il a toujours refusé les attaques personnelles ou les règlements de comptes brutaux Il s’occupera en 1792 de la défense de Louis XVI qu’il assurera avec brio malgré le danger que recelait cette fonction.
En 1804 – il a alors 78 ans – il devient président de la commission de rédaction du Code Civil. Tronchet était partisan de l’unification de la nation par la loi et il soutient que le Code Civil devait être le même pour tous les français, et il l’emporta contre Portalis qui s’opposait à une régime matrimonial unique par défaut. Par ailleurs Tronchet souhait que le Code Civil dure, il devra donc être composé de définitions claires et simples, afin d’être accessible à tous et donc plus démocratique.
Tronchet fut donc clairement l’une des sources vives d’un droit au contenu nouveau et unificateur à la chute de l’ancien Régime, conçu à partir de sa pratique du droit ancien. Quand il meurt en 1806, il est inhumé au Panthéon, ce qui en dit long sur l’opinion que ses contemporains avaient de lui. C’est à la vertu de l’ouvrage de Philippe Tessier de nous en faire redécouvrir les raisons.
Archibald PLOOM (CULTURE-CHRONIQUE.COM)