Esthétique et logique

Lors de son acte de naissance officiel en tant que science philosophique, l'esthétique s'est définie historiquement comme une épistémologie : celle du " savoir sensible " qu'en 1750 Alexander Gotlieb Baumgarten délimite à partir du savoir rationnel articulé par la logique. La carrière ultérieure de l'esthétique comme " philosophie de l'art " tendrait parfois presque à nous le faire oublier. Mais trois siècles d'une évolution certes considérable ont-ils définitivement écarté l'esthétique philosophique de ce propos initial ? Le présent volume s'attache à évaluer la présence parfois souterraine, mais finalement toujours résurgente, de la question de la connaissance et de la logique dans le champ esthétique.
Même dans les moments philosophiques où l'esthétique apparaîtra comme l'analyse d'un cadre purement subjectif d'évaluation du perçu, interdisant par là d'y voir la constitution d'un " savoir ", il est pourtant manifeste que le lien originel avec la logique ne se rompt pas. Quelles que soient par ailleurs les évolutions tout aussi capitales de cette dernière discipline et l'acception dans laquelle on la fera valoir, du cadre transcendantal à l'articulation structurelle de la connaissance dans le cognitivisme, la question sera en permanence renouvelée : si les éléments sur lesquels opère la logique rationnelle sont les concepts, quels sont à leur tour ceux à partir desquels s'élabore notre modalité esthétique de structurer la pensée, lorsqu'elle est référée au sensible ? Les regards croisés de plusieurs disciplines concourent ici à éclairer cette question depuis sa naissance jusqu'aux travaux actuels : logiciens, esthéticiens, épistémologues, métaphysiciens, analystes du discours et de l'oeuvre d'art ont un point de vue à apporter qui doit décloisonner les recherches sur le sens même du phénomène esthétique.
L'ouvrage prend donc pour objectif d'ordonner leur débat, trop peu souvent envisagé, autour des quatre problèmes cardinaux que sont la connaissance, les relations, le discours, le sens.