Entre l'emploi et le chômage

La multiplication des formes particulières d'emploi, à caractère temporaire ou à temps réduit, tend à remettre en cause la norme d'emploi classique, telle qu'elle est décrite par la législation sociale. Cette évolution affecte également la frontière entre l'emploi et le chômage, de nombreuses situations intermédiaires ayant émergé depuis le début des années 90. La possibilité ouverte aux demandeurs d'emploi de cumuler revenus d'activité et revenus de remplacement - un sur quatre se trouve désormais dans ce cas - souligne le caractère durable de ces transformations intervenues sur le marché du travail. La pratique continue d'une activité réduite ne concerne toutefois qu'une minorité de chômeurs. De la même façon, le fait d'exercer des activités réduites ne constitue pas un obstacle pour retrouver un " vrai " emploi. La propagation des situations intermédiaires entre l'emploi et le chômage incite à interroger la pertinence des concepts actuellement utilisés pour décrire la place des individus hors la sphère traditionnelle de l'emploi. En effet, les trajectoires professionnelles des chômeurs qui travaillent occasionnellement sont marquées d'une forte inertie et pour certaines catégories d'entre eux - notamment les chômeurs de longue durée - l'enchaînement de situations précaires fonctionne comme une trappe à chômage. Dans ces conditions, l'idée selon laquelle l'emploi salarié ne peut plus assurer, à lui tout seul, dans les sociétés développées, le rôle central qu'il avait acquis dans l'intégration sociale des individus, coïncide avec la recherche de réconcilier un marché du travail plus flexible et la préservation de la cohésion sociale.