Dans les derniers jours du mois d’août, Marie s’installe à Peine-Perdue, un hameau isolé à 900 mètres d’altitude, avec son fils âgé de quinze ans. Depuis sa fenêtre, Jef l’observe. Immédiatement, il saisit qu’elle fuit quelque chose ou quelqu’un. La maison qu’elle investit a peu de confort, la ville est à vingt-cinq kilomètres et la route à lacets est peu praticable.
Il craint que l’arrivée de cette jeune femme perturbe l’équilibre du hameau. Jusque-là, ils n’étaient que trois à y vivre. Lui, l’ancien flic, qui cherche à échapper à sa conscience ; Amélie,
une veuve, et Baptiste, un vieillard sans famille. Chacun s’arrange avec ses secrets.
Jef ne se trompe pas. C’est la peur qui a mené Marie à Peine-Perdue. Mais aussi l’espoir que Bruno, son ex-mari, ne la retrouve pas. Ce dernier connaît l’existence de cette bâtisse, propriété des arrière-grands-parents de Marie, mais il ne sait pas dans quelle région elle se situe. Condamné pour violences conjugales, sa sortie de prison est imminente. Même si la jeune femme a gardé le secret au sujet de sa nouvelle vie et qu’elle est très prudente, elle est certaine que son bourreau la traquera et découvrira son adresse. C’est une question de temps…
Elle utilise ce répit pour se reconstruire et reprendre des forces. Surtout physiques (en dépit des séquelles), car la destruction psychologique est très profonde. L’angoisse ne la quitte pas, entoure tous ses gestes et se glisse dans toutes ses pensées. Jef, en tant qu’ancien flic, reconnaît les signes de la peur.
Le récit alterne entre deux temporalités et livre plusieurs perceptions des faits. Marie décrit sa vie conjugale, la violence qui a grandi, insidieusement. Elle se rappelle les phases de pardon qui ont succédé à la terreur, l’attention à éviter les attitudes qui énervaient son mari et l’envie de se révolter, l’amour et la haine qui s’entremêlaient, la colère et la peine, suivies d’un sentiment de culpabilité. Elle raconte aussi le présent ; son instinct lui souffle que le danger se rapproche. Elle est persuadée que Bruno la recherche et qu’il réussira à la débusquer. Elle décrit sa nouvelle existence, la peur au ventre, se préparant au pire, telle une bête traquée. Elle lutte contre l’épuisement qui résulte de cette hypervigilance, cette attente qui se transforme presque en besoin, tant ses nerfs sont fatigués. Par son regard extérieur et son œil professionnel, Jef éclaire les évènements. Enfin, un narrateur comble les manques, il donne des précisions permettant d’établir une représentation complète de la situation.
Avec finesse, Chantal Forêt autopsie l’engrenage de la violence conjugale, le silence qui l’entoure, les yeux de l’entourage qui se ferment et la voix de la victime qui s’éteint, car elle n’est pas écoutée et finit par douter d’elle-même. Elle analyse, également, cette peur qui persiste après la séparation. Car même si le conjoint est condamné (ce qui, hélas, n’est pas toujours le cas), il finit par retrouver sa liberté. Contrairement à sa proie, enfermée dans l’angoisse et forcée de se cacher, de s’emprisonner, pour échapper aux envies de vengeance du bourreau. Hélas, les journaux démontrent l’impuissance de la justice en matière de protection.
J’ai été très touchée par Marie et par toutes les femmes qui ont nourri son personnage… C’est le troisième livre que je lis de Chantal Forêt et, une fois encore, j’ai été subjuguée par son écriture ciselée et sensible, par la force et la précision des portraits et j’ai été captivée par le suspense psychologique. J’ai adoré Elle demeure.
Un suspense psychologique réussi
Dans les derniers jours du mois d’août, Marie s’installe à Peine-Perdue, un hameau isolé à 900 mètres d’altitude, avec son fils âgé de quinze ans. Depuis sa fenêtre, Jef l’observe. Immédiatement, il saisit qu’elle fuit quelque chose ou quelqu’un. La maison qu’elle investit a peu de confort, la ville est à vingt-cinq kilomètres et la route à lacets est peu praticable.
Il craint que l’arrivée de cette jeune femme perturbe l’équilibre du hameau. Jusque-là, ils n’étaient que trois à y vivre. Lui, l’ancien flic, qui cherche à échapper à sa conscience ; Amélie, une veuve, et Baptiste, un vieillard sans famille. Chacun s’arrange avec ses secrets.
Jef ne se trompe pas. C’est la peur qui a mené Marie à Peine-Perdue. Mais aussi l’espoir que Bruno, son ex-mari, ne la retrouve pas. Ce dernier connaît l’existence de cette bâtisse, propriété des arrière-grands-parents de Marie, mais il ne sait pas dans quelle région elle se situe. Condamné pour violences conjugales, sa sortie de prison est imminente. Même si la jeune femme a gardé le secret au sujet de sa nouvelle vie et qu’elle est très prudente, elle est certaine que son bourreau la traquera et découvrira son adresse. C’est une question de temps…
Elle utilise ce répit pour se reconstruire et reprendre des forces. Surtout physiques (en dépit des séquelles), car la destruction psychologique est très profonde. L’angoisse ne la quitte pas, entoure tous ses gestes et se glisse dans toutes ses pensées. Jef, en tant qu’ancien flic, reconnaît les signes de la peur.
Le récit alterne entre deux temporalités et livre plusieurs perceptions des faits. Marie décrit sa vie conjugale, la violence qui a grandi, insidieusement. Elle se rappelle les phases de pardon qui ont succédé à la terreur, l’attention à éviter les attitudes qui énervaient son mari et l’envie de se révolter, l’amour et la haine qui s’entremêlaient, la colère et la peine, suivies d’un sentiment de culpabilité. Elle raconte aussi le présent ; son instinct lui souffle que le danger se rapproche. Elle est persuadée que Bruno la recherche et qu’il réussira à la débusquer. Elle décrit sa nouvelle existence, la peur au ventre, se préparant au pire, telle une bête traquée. Elle lutte contre l’épuisement qui résulte de cette hypervigilance, cette attente qui se transforme presque en besoin, tant ses nerfs sont fatigués. Par son regard extérieur et son œil professionnel, Jef éclaire les évènements. Enfin, un narrateur comble les manques, il donne des précisions permettant d’établir une représentation complète de la situation.
Avec finesse, Chantal Forêt autopsie l’engrenage de la violence conjugale, le silence qui l’entoure, les yeux de l’entourage qui se ferment et la voix de la victime qui s’éteint, car elle n’est pas écoutée et finit par douter d’elle-même. Elle analyse, également, cette peur qui persiste après la séparation. Car même si le conjoint est condamné (ce qui, hélas, n’est pas toujours le cas), il finit par retrouver sa liberté. Contrairement à sa proie, enfermée dans l’angoisse et forcée de se cacher, de s’emprisonner, pour échapper aux envies de vengeance du bourreau. Hélas, les journaux démontrent l’impuissance de la justice en matière de protection.
J’ai été très touchée par Marie et par toutes les femmes qui ont nourri son personnage… C’est le troisième livre que je lis de Chantal Forêt et, une fois encore, j’ai été subjuguée par son écriture ciselée et sensible, par la force et la précision des portraits et j’ai été captivée par le suspense psychologique. J’ai adoré Elle demeure.