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En 1858, la comtesse de Ségur présente Les Petites Filles modèles comme la suite des Malheurs de Sophie, et ces deux livres figurent depuis lors au coeur du répertoire classique de la littérature française pour la jeunesse. Portraits d'enfants bien nés saisis au moment où ils s'interrogent sur le bien et le mal, tableaux d'un milieu social où ne cesse de se poser la question des normes et des limites, les petites filles doivent y être "modèles" en vertu d'un idéal de comportement.
Mais l'atteindre n'est pas si simple ! Et l'on a amplement pointé, au-delà des récits en apparence innocents et inoffensifs de la comtesse de Ségur, les bourgeons de l'ambiguïté. Dans son remake, Romain Slocombe les fait éclore : ses petites filles modèles deviennent les héroïnes d'un roman inquiétant et pervers, érotique et vampirique. Comme si la comtesse de Ségur avait retiré la sourdine pour écrire un ouvrage destiné à des enfants plus âgés, voire à des adultes, laissant libre cours à la progression de la cruauté.
Comme si elle avait quelquefois rêvé d'être Sade, non plus comtesse mais marquise...
RECOMMANDÉ PAR LE SITE CULTURE-CHRONIQUE
DES PETITES FILLES MODÈLES de Romain SLOCOMBE
Ce titre très évocateur va probablement agir comme un aimant pour toutes celles et ceux anciens lecteurs de La Comtesse de Ségur. Qu’il est agréable de retrouver les héros de son enfance ! C’est donc avec une curiosité non dissimulée qu’il faut aborder la lecture du livre de Romain Slocombe ! Dès les premières pages, les souvenirs refont surface. Elles sont bien présentes, Marguerite, Camille, Madeleine…. Elles semblent toujours aussi bien élevées, sages. Mais patience ! Juste le temps de se réapproprier les personnages avant que l’auteur ne décide de leur faire prendre un chemin moins conventionnel. Marguerite, jeune fille prude, doit quitter la capitale pour raisons de santé. Sa mère, la belle Madame de Rosbourg l’accompagne. Suite à un accident, au cours duquel le cocher est mortellement blessé, elles sont hébergées chez la Comtesse Madame de Fleurville et ses filles Camille et Madeleine. Commencent alors des jours heureux durant lesquels Marguerite, au contact de ses nouvelles amies, va doucement et malgré elle, faire tomber les carcans d’une éducation rigide et religieuse. Jusqu’où le poids des traditions, des convenances et de la bienséance résistera t-il ? Très vite, l’ambigüité de certains propos laisse entrevoir un tournant plus malicieux et sulfureux dans la suite de l’histoire. Marguerite, avec son angélisme exacerbé, pourra t-elle réprimer son éveil des sens et braver les interdits ?
C’est toutefois un raccourci un peu trop rapide que de penser que la sensualité et l’érotisme sont les fils conducteurs de ce roman ! Le lecteur, trop hâtif dans ses conclusions, ne manquera pas d’être surpris et les évènements qui se succèdent l’éloigneront définitivement de l’histoire gentillette de son enfance. C’est bien d’un livre pour adultes dont il s’agit maintenant, dans lequel Romain Slocombe a su habilement et en douceur faire évoluer les personnages.