En cours de chargement...
A l'âge de 20 ans, suite à une déception amoureuse, le narrateur part pour Taiwan sans trop savoir que faire de sa vie. Il se laisse séduire par l'accueil d'un bonze dans un temple zen du nord de l'île. Seul étranger à y être accueilli, alors que rien ne l'y préparait, il découvre, avec le regard ingénu et confiant de la jeunesse, le quotidien des moines et des nonnes bouddhistes, rythmé par la méditation et l'étude des textes.
Il apprend le chinois, la méditation, épouse peu à peu leur existence tissée de passions simples, en harmonie avec une nature qui fait écho à l'imaginaire poétique de la Chine. Il se lie d'amitié avec celles et ceux qui ont choisi la voie monastique et lui livrent des bribes de leur histoire et devient ainsi Maître du tambour et donc Maître du temps. Ce bel équilibre est rompu avec une grâce soudaine.
Extrait : Il me fallut peu de temps pour épouser le rythme monastique. C'était, jour après jour, le même canevas, immuable comme la fuite des jours. Deux durées scandaient l'aventure individuelle et collective : celle de la recherche de la paix intérieure et de la vacuité de l'esprit par la méditation, et celle qui organisait les grands mouvements cycliques de la nature l'alternance des jours et des nuits, la course des astres, le bruissement des arbres, l'éclosion des fleurs, la chute des feuilles.
A quatre heures trente retentissaient les premiers coups de tambour. Les portes coulissaient, les moines sortaient en silence, ceints de leur kolomo plus sombre que la nuit.
RECOMMANDÉ PAR CULTURE-CHRONIQUE
“J’avais quitté la France le mois précédent. J’avais tout juste vingt ans. Amoureux à sens unique d’une fille qui se prénommait Aurore, j’avais construit sur son nom, et sans qu’elle le sût , tout un échafaudage de rêves, qui avaient fini par se déliter. Misérable, je n’avais alors eu qu’une hâte, celle de quitter Aix en Provence qui m’était devenu une prison où j’étouffais.” Parfois un destin bascule en un mot, comme une carte qu’on jette dans une partie perdue d’avance, ici l’épithète “misérable” qui annonce un changement de cap radical pour le jeune Sébastien Ortiz. Rupture complète avec sa vie d’avant et départ pour Taïwan où il s’installe chez un ami puis découvre le monastère d’Emein où vivaient des moines et des nonnes à l’année et où le maître lui propose de rester “un an, dix ans ou cent ans” s’il voulait .
Commence alors une aventure intérieure qui constitue l’essence de l’ouvrage d’Ortiz “Dans un temple zen”, aventure qui commence chaque jour à quatre heures trente du matin moment où les moines se lèvent pour commencer la première méditation. Le type de méditation que découvre le jeune homme est appelé “zazen” au Japon. Position du lotus ou du demi lotus, colonne vertébrale redressée, nuque étirée, langue calée contre le palais, main gauche paume orientée vers le ciel sur la main droite, les pouces entrant légèrement en contact, les poignets reposant sur les cuisses, inspirer naturellement et expirer longuement en poussant sur le ventre au terme du processus d’expiration, garder les yeux ouverts et ne pas s’accrocher aux pensées qui passent, le plus difficile évidemment… Ortiz partage la vie des moines. Il prend l’habitude de jardiner. “ Après chaque averse, mon parterre était envahi par les mauvaises herbes. Je les arrachais une à une, patiemment, comme il est dit des pensées superflues pendant la méditation.”
La pratique de la méditation va permettre au jeune homme de retrouver son centre. Les effets d’une vie basée sur la répitition des zazens vont produire une plus grande présence au monde – en particulier vis à vis de ce qui peut sembler comme les manisfestations les plus ordinaires de l’existence – une adhésion pleine et entière à l’instant présent, une sérénité qui récuse les passions négatives et un tonus rarement éprouvé. Au terme de l’ouvrage le lecteur a compris le sens de ce beau voyage qui se résume dans une très belle formule de Sébastien Ortiz : “Je redescendis dans le monde plus léger que je ne l’avais quitté”. Et si au fond nos vies tenaient à cette capacité de retrouver cette légèreté cachée au fond de nous ? Un bien bel ouvrage en vérité…
Archibald PLOOM (CULTURE-CHRONIQUE.COM)