Emmanuelle Arsan a compris toute jeune que l'adage nietzschéen " Aut liberi aut libri " s'adressait à elle. Et c'est sans regret qu'elle nous dit aujourd'hui : "Je n'ai pas d'autres enfants que les mots que j'écris". Ces enfants de pensée, ces enfants de passage, elle les a conçus sans faute originelle, sur une terre présente. Elle les a élevés à l'écart des interdits et des tabous, des peurs et des reproches. Elle les a engagés dans la recherche éperdue du bonheur. Ces enfants de l'esprit, elle les a vus agrandir leur recherche aux dimensions du cosmos. Ces enfants de poésie, elle les a entendu dire l'infini du désir et du rêve réalisés dans le nombre, dans l'espace doux, dans le mouvement, dans le temps. Ces enfants de liberté, elle leur a appris à démentir le sacré, à dénier le tragique, à miser sur l'imagination triomphant de l'imaginaire, sur l'art et sur la science, qui nous bousculent et nous bouleversent. Pour finir, c'est de ces enfants-là qu'elle attend des réponses d'hommes et de femmes à venir aux impasses dont nous sommes les héritiers.