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"Déraciné, méprisé, exploité, solitaire, asservi, meurtri, l'Indien puisa en lui-même et dans sa longue nuit les ressources de la résistance. Si le suicide, la trahison, la démission altéraient parfois la volonté de ceux qui sur la plantation tentaient de suivre Râma, si le doute s'emparait de quelques-uns, les jeunes, eux, maintinrent le cap vers l'aube de la liberté. Leurs chansons et leurs messages flottèrent sur la mer de verdure en résistant aux assauts du vesou.
Partout, ils fécondèrent les fleurs des jeunes années, parlèrent de tous les espaces pouvant servir leur dignité. Sur les feuilles, sur les écorces, sur les peaux de bête, les jantes des charrettes, ils écrivirent en tamoul : Vive la liberté..." En découvrant et en épousant Aurore, la fille que son père lui avait choisie vingt ans plus tôt, un autre siècle commença pour Râma. Après l'abolition de l'esclavage en 1848, les planteurs de canne à sucre et les autorités politiques des Antilles et de la France firent appel à la main-d'oeuvre indienne pour suppléer les esclaves noirs dans les champs et sauvegarder l'économie des îles.
Pendant plus de trente ans, des dizaines de milliers d'Indiens, souvent arrachés à leur pays, fécondèrent de leur sueur et de leur sang ces terres lointaines. Renié par sa famille à cause d'une faute, Râma, le héros de ce roman, fils de brahmane, quitte l'Inde sur l'Aurélie en 1885. Au cours de la longue traversée, la mort fauche Sarah, la fille paria qu'il entendait épouser à la Guadeloupe. Alors, il se met au service de sa communauté et de sa culture sur cette terre peuplée par de douloureux accouchements de l'histoire.