Lorsque la police annonce à Marco que sa mère est morte et que celle-ci rentre quelques minutes plus tard, le jeune homme comprend qu'un secret vient d'éclater au grand jour. Près de vingt ans auparavant, son père a contracté un mariage blanc avec Anka, jeune immigrée des pays de l'est, contre de l'argent.
1500 € pour une signature en bas d'un contrat.
107 pages.
C'est tout ce qu'il faut à Guillaume Guéraud pour taper un grand coup, secouer l'âme durablement. Si Anka prend pied dans l'actualité, ce sont pourtant l'universalité et l'intemporalité des émotions qui marquent
lors de la lecture de ce roman-uppercut. L'annonce du décès de cette femme qu'il n'a jamais connue, morte dans l'indifférence la plus totale, brise quelque chose en Marco et le plonge dans un état second. Face à l'apparent désintérêt de ses parents, davantage ennuyés par les démarches administratives que véritablement choqués par cette histoire, Marco ressent le besoin pressant de partir à la recherche de ce que fut la vie de cette inconnue. Pour savoir, pour comprendre.
C'est le début d'un récit façon "compte à rebours". La narration, alternée entre les investigations de Marco et les flash-back de la vie d'Anka, s'accélère progressivement jusqu'au moment fatidique que l'on sent arriver et que l'on redoute. L'écriture incisive, percutante, très réaliste, nous plonge immédiatement aux côtés de cet adolescent sans histoires qui bascule, figure de proue de Guillaume Guéraud. A l'image de Je mourrai pas gibier, Anka est un récit puissant, violent, chronique d'une folie ordinaire qui terrifie plus que tout car nous pouvons nous imaginer sans mal à la place des protagonistes. A lire.
Des étincelles...
Tout commence comme un mauvais film ou plutôt comme une mauvaise série télé quand Marco rencontre pour la première fois à sa porte des flics plus bêtes et plus vrais que nature. Il lui faudra juste le temps d'assimiler l'annonce de la mort de sa mère pour qu'elle rentre comme chaque jour dans l'appartement à l'heure dite. Roman noir ou roman social alternant à rebours de la fin d'une vie sacrifiée et foutue et la vie d'un adolescent qui se mêle de ce qui ne le regarde pas. Guillaume Guéraud signe un petit chef d’œuvre âpre et puissant, sensible où comme d'habitude le cinéma irrigue un peu le cerveau alors qu' à l'extérieur se disputent la mort et "les étincelles". Il atteint des sommets dans le dialogue père-fils et sans en faire tout un plat révèle une société, la notre où la débine côtoie les gouffres, l'humour et la bêtise. Pas de héros, de résistant ou de chevalier blanc mais une photo, juste une, un histoire qui subjugue et interroge sans marteler aucun discours, édifiant. C'est subtil et profond, un grand Guillaume Gueraud, économe et plein. A partir de 15/16 ans