"86, année blanche " est un roman vif, et profondément évocateur. L'auteur Lucile Bordes nous propose une remontée dans le temps de près de 30 années. Nous sommes le 29 avril 1986 et l'un des réacteurs de la centrale nucléaire de Tchernobyl explose. Aussitôt toute l'attention des médias se porte sur cette petite ville ukrainienne inconnue jusqu'alors. Et puis il y a ce nuage radioactif qui commence à s'étendre vers la région occidentale de l'Europe, un nuage proliférant et inquiétant. L'écrivain nous propose 3 regards sur cet évènement qui ébranla le monde, trois
regards de femmes. La première est Lucie une adolescente vivant dans le sud de la France et comme beaucoup de français elle s'inquiète de la trajectoire du nuage de Tchernobyl ; la seconde vit à Prypiat à trois kilomètres de la centrale, elle s'appelle Ludmila et veut se persuader, en bonne soviétique, que tout est sous contrôle ; enfin à Kiev, alors que la panique s'empare de l'Europe Ioulia vit le départ de son amant français comme la grande catastrophe de sa vie.
On se dit en tournant les pages de ce roman que la littérature est une invention magnifique. A ce titre Lucile Bordes parvient à rendre l'atmosphère très particulière des jours qui suivirent la catastrophe. Trois regards parmi des millions qui vont suivre l'évolution de l'un des évènements les plus importants de l'après seconde guerre mondiale. "C'était treize heures quand j'ai allumé la télé . Un panneau "Stop" vaguement bricolé retenait le nuage radioactif au dessus de Monaco.. Il ne passerait pas la frontière.". Lucie nous rappelle à quel point tous ceux qui ont vu passer le nuage se sont imaginés qu'il n'étaient pas pour eux. Mais le plus intéressant tient au croisement des regards. Les chapitres sont courts ce qui permet une alternance rapide des points de vue et une superposition de l'univers des trois femmes. On se glisse dans leurs vies, on les accompagne. Ludmila s'inquière : "...sur les ondes de "Voices of América", j'ai entendu pour la première fois l'expression "accident nucléaire majeur" à propos de ce qui s'est passé à la centrale". Ludmila est pourtant une parfaite soviétique convaincue que le régime sait ce qu'il fait mais à tout hasard elle écoute tout de même "Voices of América". Quand à Ioulia elle apprend que son mari s'est porté volontaire pour aller à Tchernobyl liquider la catastrophe, une manière de liquider leur couple après le départ de son amant.
Un évènement, trois vies, trois manières d'affronter la réalité qui vont constituer au final un excellent roman. "86, année blanche" est une très belle découverte. Oui décidément la littérature est une magnifique invention.
Archibald PLOOM (CULTURE-CHRONIQUE.COM)
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"86, année blanche " est un roman vif, et profondément évocateur. L'auteur Lucile Bordes nous propose une remontée dans le temps de près de 30 années. Nous sommes le 29 avril 1986 et l'un des réacteurs de la centrale nucléaire de Tchernobyl explose. Aussitôt toute l'attention des médias se porte sur cette petite ville ukrainienne inconnue jusqu'alors. Et puis il y a ce nuage radioactif qui commence à s'étendre vers la région occidentale de l'Europe, un nuage proliférant et inquiétant. L'écrivain nous propose 3 regards sur cet évènement qui ébranla le monde, trois regards de femmes. La première est Lucie une adolescente vivant dans le sud de la France et comme beaucoup de français elle s'inquiète de la trajectoire du nuage de Tchernobyl ; la seconde vit à Prypiat à trois kilomètres de la centrale, elle s'appelle Ludmila et veut se persuader, en bonne soviétique, que tout est sous contrôle ; enfin à Kiev, alors que la panique s'empare de l'Europe Ioulia vit le départ de son amant français comme la grande catastrophe de sa vie.
On se dit en tournant les pages de ce roman que la littérature est une invention magnifique. A ce titre Lucile Bordes parvient à rendre l'atmosphère très particulière des jours qui suivirent la catastrophe. Trois regards parmi des millions qui vont suivre l'évolution de l'un des évènements les plus importants de l'après seconde guerre mondiale. "C'était treize heures quand j'ai allumé la télé . Un panneau "Stop" vaguement bricolé retenait le nuage radioactif au dessus de Monaco.. Il ne passerait pas la frontière.". Lucie nous rappelle à quel point tous ceux qui ont vu passer le nuage se sont imaginés qu'il n'étaient pas pour eux. Mais le plus intéressant tient au croisement des regards. Les chapitres sont courts ce qui permet une alternance rapide des points de vue et une superposition de l'univers des trois femmes. On se glisse dans leurs vies, on les accompagne. Ludmila s'inquière : "...sur les ondes de "Voices of América", j'ai entendu pour la première fois l'expression "accident nucléaire majeur" à propos de ce qui s'est passé à la centrale". Ludmila est pourtant une parfaite soviétique convaincue que le régime sait ce qu'il fait mais à tout hasard elle écoute tout de même "Voices of América". Quand à Ioulia elle apprend que son mari s'est porté volontaire pour aller à Tchernobyl liquider la catastrophe, une manière de liquider leur couple après le départ de son amant.
Un évènement, trois vies, trois manières d'affronter la réalité qui vont constituer au final un excellent roman. "86, année blanche" est une très belle découverte. Oui décidément la littérature est une magnifique invention.
Archibald PLOOM (CULTURE-CHRONIQUE.COM)