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Pourquoi une étude sur un genre désuet en 1998 ? Pour l'époque du téléphone et de la télévision, le roman épistolaire peut-il éveiller autre chose qu'un intérêt archéologique ? Une nostalgie peut-être. La " nouvelle critique " y cherche en tout cas des exemples privilégiés de performances formelles, et dans ces dernières années des romanciers plus nombreux qu'on ne le croirait le ressuscitent en le réinterprétant.
On verra le genre naître de la courtoisie romane - le premier roman à faire une grande place aux lettres est italien, et écrit en latin, le premier roman épistolaire véritable est espagnol -, puis devenir l'une des expressions favorite de l'honnêteté française, sans jamais renier ses origines : Werther en Allemagne, Jacopo Ortis en Italie, le Gustave de Mme de Krüdener seront comme les épistoliers du Moyen Age des " prisonniers d'amour ".
Jalonnée par des chefs-d'œuvre comme les Lettres portugaises de Guilleragues, La Nouvelle Héloïse, Les Liaisons dangereuses, cette histoire aboutit aux recherches formelles d'un Chklovski, d'un Gripari ou de Michel Melot en 1993. Par-delà les ruptures d'une écriture dont l'esthétique est celle du discontinu, on relèvera les permanences d'une vocation à la fois sentimentale et didactique, et de structures qui sont celles de la séparation et de l'exil.