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Une femme d'esprit, qui n'a pas des idées bien arrêtées sur les mérites ittéraires, m'a prié, moi indigne, de corriger le style de ce roman. Je suis loin d'adopter certains sentiments politiques qui semblent mêlés à la narration ; voilà ce que j'avais besoin de dire au lecteur. L'aimable auteur et moi nous pensons d'une manière opposée sur bien des choses, mais nous avons également en horreur ce qu'on appelle des applications.
On fait à Londres des romans très piquants : Vivian Grey, Almak's High Life, Matilda, etc. , qui ont besoin d'une clé. Ce sont des caricatures fort plaisantes contre des personnes que les hasards de la naissance ou de la fortune ont placées dans une position qu'on envie. Voilà un genre de mérite littéraire dont nous ne voulons point. L'auteur n'est pas entré, depuis 1814 au premier étage du palais des Tuileries ; il a tant d'orgueil, qu'il ne connaît pas même de nom les personnes qui se font sans doute remarquer dans un certain monde.
Romantique et énigmatique
C'est un premier roman, représentatif de l’œuvre à venir, et donc à conseiller aux jeunes lecteurs qui seraient intéressé par la lecture d'un roman appartenant du courant romantique, mais rebuté par la taille imposante de la Chartreuse de Parme ou du Rouge et le noir. Il se passe durant la Restauration et fourmille de détails historiques sur cette période, on y retrouve des thèmes typiques de l’œuvre de Stendhal, l'ambition et le mal être du personnage d'Octave, les intrigues de Salon, la force et la pureté d'un amour presque désincarné. Au niveau du style, Stendhal se cherche encore, mais pratique déjà cette ironie de la distance avec son lecteur où l'on voit le narrateur qui commente sa propre intrigue. C'est aussi un roman à clefs, un peu cryptique, mais parlant en filigrane de l'impuissance du personnage principal et donc d'amour platonique. Il aborde aussi un thème récurant : Comment l'amour peut-il résister à l'usure du temps, un amour total, dépouillé de toute désir charnel est-il possible et même souhaitable pour sa propre survie ? Comment éviter de goûter trop rapidement à ce « fruit plein de cendre amère » dont parle André Gide ? La force de l'écriture du roman est de faire silence sur le mal dont souffre Octave, cette sublimation enclose dans le désir d'écrire dévoile dans le même temps l'impossibilité d'effacer en totalité un désir qui reste là, ancré, bruissant entre chaque phrases du texte. Je me souviens aussi, pour avoir lu ce roman en pleine adolescence, y voir exprimer tous les affres dont on peut souffrir dans ce temps des métamorphoses, une certaine connivence, une complicité qui ne s'est jamais éteinte. Et cela m'a surtout donner envie de lire d'autres textes de Stendhal depuis.