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« J'en pleure
Les quatre points cardinaux
ne lui suffisaient pas
Il a fallu
qu'il en trouve
un cinquième
et qu'il enferme
cinq fois par jour
tous les horizons de sa vie
dans le corps d'une seule
femme vêtue de noir »
Quels points communs entre les habitants d'un village de Grèce, un lit d'hôpital où se meurt un ami et la femme d'une cité de banlieue dont le fils a choisi le Coran ? On ne les entend pas, on ne les voit pas.
De la Crète à Créteil, de elle à il, le talent de Bruno Doucey est de savoir donner vie à ceux qui sont privés de parole. Sous sa plume, « les mots remontent du silence comme l'odeur de la terre sous une pluie d'été ». Ses poèmes sont autant de chroniques d'une crise violente d'où émergent des noms et des visages : ceux d'un peuple qui ne veut pas vivre à genoux, d'un homme qui combat le crabe entouré des siens, des migrants qui se massent aux portes de l'Europe, d'une mère alliée à d'autres mères.
Avec S'il existe un pays (2013), il nous invitait à un voyage autour du monde ; avec Ceux qui se taisent, c'est le monde qui vient à nous. Le livre-témoin d'une époque.
Pour Bruno Doucey, poète, éditeur de poètes, la poésie permet de faire entendre ce que les mots ne disent pas, de voir ce que les yeux ne regardent pas, de toucher ce que la main ignore. Avec son dernier recueil paru en 2013, S'il existe un pays (ed.
Bruno Doucey), ce sourcier des images nous offrait en partage le fruit de ses voyages autour du monde ; avec Ceux qui se taisent, il donne la parole à ceux qui ne l'ont pas. Et ce sont les silences que sa poésie habite, en témoin engagé de son temps.
Retentissant silence de ceux qui se taisent
De tout temps, poète est témoin de son époque. Il est celui qui voit, qui entend, et qui transmet.
Avec ce nouveau recueil, Bruno Doucey laisse les mots à "ceux qui se taisent", ceux qui subissent, ceux qui se battent, silencieux face aux injustices de notre monde.
Celui-là, c'est le peuple grec dont le dos ploie sous le poids de la crise mais ne baisse pas les yeux.
Celui-ci, c'est cet ami, seul, sur son lit d'hôpital, face à la tempête de la maladie.
Ceux-là, ce sont tous ces migrants, "enfants de la terre qui se décompose".
Enfin, ce sont elles, ces mères blessées qui voient leurs fils pour qui se fanent fleur de vie au profit des cendres de la radicalisation.
Des vers qui s'élèvent, barricade contre le racisme, hymne à la vie que les victimes des attentats du 13 novembre aimait elles aussi.