Roger Laporte

Je ne suis pas un écrivain. Pas davantage un historien. Mais je suis un témoin, un témoin qui a fait la guerre, connu le sort des prisonniers de guerre, s'est évadé, a fait de la Résistance. Cinq mois durant, j'ai été pensionnaire dans les prisons allemandes ; cela s'est continué par les camps de concentration, où les chances de mourir étaient très supérieures à celles de survivre. Mes camps ? Le Struthof d'abord, et son terrible kommando de Kochem ; ensuite Dachau et divers kommandos.
Dès mon retour, à l'été 1945, j'ai écrit des notes pour fixer mes souvenirs. Je l'ai fait pour que mes enfants sachent. Je me suis tu longtemps, par pudeur peut-être, par orgueil sans doute. "Les gens ne comprendront pas, à quoi bon écrire ?" Voilà ce que j'ai longtemps pensé. Si aujourd'hui je me décide à rompre le silence, c'est que j'ai peur... Je rêve à nouveau de SS, de chiens, de barbelés.
Ces nuits de cauchemar sont peuplées de démons qu'il me faut combattre et exorciser. J'ai besoin de retrouver la paix de l'âme. Je voudrais vivre heureux dans un monde harmonieux. C'est pourquoi j'entreprends ce travail d'écrire mes souvenirs.