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Toute réflexion sur la peine doit viser à surmonter l'opposition entre les deux postures simplificatrices mais partiellement véridiques que sont d'une part sa dénonciation comme mécanisme de domination sociale, et d'autre part sa réduction à un processus de réduction du risque. Ce dépassement est nécessaire car la première posture est portée principalement par le milieu de la recherche et la seconde revendiquée comme évidente par les responsables politiques ce qui conduit à un évitement néfaste : les décisions politiques tiennent peu compte de la recherche, tandis que celle-ci se désintéresse d'une possible réforme ; en résulte l'inertie constatée depuis des décennies quant au contenu même des peines.
Autrement dit, alors que le sens de la peine est cherché du côté de l'anthropologie et de l'éthique, c'est-à-dire à la fois comme une mise en travail de la culpabilité et comme le moyen de participer à réhabiliter la victime, ce propos est délégitimé, accusé d'être hors-sol par ceux qui, à gauche comme à droite, ne veulent considérer que son utilité sociale - les uns considérant que le judiciaire et le pénitentiaire sont une entreprise de camouflage de l'injustice sociale en justice pénale, les autres y voyant un rempart contre l'ennemi qui menace la société.
La pénalité ne pourrait avoir d'autre sens que celui d'un rapport de force. Rendre peine signifiante n'est donc possible qu'à condition à la fois de considérer l'accablante homogénéité sociale des condamnés, et de faire droit à une prise en compte de la dangerosité. La rencontre de ces différents impératifs ne parait possible qu'au niveau politique. La peine ne serait plus alors à comprendre comme prononcée au sein d'une communauté déjà constituée, maiscomme un des actes essentiels qui participe à instituer sans cesse la communauté.