Pendant une pause de la tourmente napoléonienne, un jeune philosophe de 30 ans demande à enseigner dans la prestigieuse Université de Iena, administrée par Goethe et récemment illustrée par les cours de Fichte. Il présente une thèse latine sur la liberté des planètes et l'harmonie du cosmos, où il critique ass…
Pendant une pause de la tourmente napoléonienne, un jeune philosophe de 30 ans demande à enseigner dans la prestigieuse Université de Iena, administrée par Goethe et récemment illustrée par les cours de Fichte. Il présente une thèse latine sur la liberté des planètes et l'harmonie du cosmos, où il critique assez minutieusement la mécanique et l'astronomie du vieux Newton, désormais dépassées par la nouvelle physique des " forces vives " et des " totalités organiques " (la " Philosophie de la Nature " réactivée par Goethe, Baader et Schelling).
Cet opuscule très peu connu, et traduit ici en français pour la première fois, contient déjà certaines idées séduisantes, par exemple sur l'unité indissoluble entre force et matière (dans la ligne de Leibniz), ou sur le remplissement réglé de l'Univers (c'est l'héritage de Kepler et des anciens Grecs), idées que le philosophe développera dans son système ultérieur.
Malheureusement sa critique de Newton comporte des contresens injustifiables et désolants, qu'il répétera toute sa vie. En fin de compte, Hegel n'a pas compris ce qu'avait apporté Newton.
Ce constat éveille bien des interrogations : comment la philosophie du XVIIIe siècle a-t-elle accueilli la mécanique nouvelle ? (Dans son importante préface, D. Dubarle apporte sur ce point des précisions inédites, notamment à propos de Kant). La " science " dont Hegel se réclame, et sa descendance après lui (Marx entre autres), a-t-elle rien à voir avec celle de Newton ?