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Le mouvement de numérisation à l'oeuvre depuis une trentaine d'années gagne aujourd'hui des pans de plus en plus étendus de la réalité via l'extension des capteurs et des objets connectés. Dorénavant, les flux de data témoignent de la quasi-intégralité des phénomènes, s'érigeant comme l'instance primordiale de l'intelligibilité du réel. Une connaissance sans cesse approfondie s'instaure, orientant en retour les décisions individuelles et collectives au prisme d'algorithmes visant les plus hautes optimisation, fluidification et sécurisation des existences et des sociétés.
Les technologies informationnelles imposent un mode de rationalité fondé sur la définition chiffrée de toute situation et sur une maîtrise indéfiniment accrue du cours des choses. Une raison numérique établie sur l'appréhension et l'évaluation en temps réel des faits ordonne désormais les pratiques du commerce, de l'enseignement, de la médecine, les rapports aux autres, à soi-même, à la ville, à l'habitat...
Ce livre examine, en s'appuyant sur une foultitude d'exemples, la quantification et la marchandisation intégrales de la vie qui s'instituent, soutenues par l'industrie du traitement des données, aujourd'hui dotée d'un pouvoir qui perturbe nombre d'acquis démocratiques fondamentaux. Avec une rare lucidité et une écriture d'une précision clinique, Eric Sadin dévoile les impensés, analyse les processus en cours, dresse une cartographie détaillée des forces à l'oeuvre...
Observations et réflexions qui dessinent une nouvelle condition humaine, et en appellent à la politisation des enjeux induits par la puissance toujours plus totalisante détenue par les systèmes computationnels.
Non mais dans quel monde on vit!?
Un état des lieux objectif, très documenté, très argumenté, d'une rigueur admirable écrit dans une langue limpide : il n' en fallait pas moins pour s'attaquer à un sujet qui est LE dispositif, formé par nous et nous formant en retour, en permanence et de plus en plus intensément, le plus caractéristique de notre époque . "Le" numérique, donc, dont le phénomène des Big Data est loin d'avoir fini de nous dépasser : nous avons échangé en 2014 autant de données que l'Humanité depuis 2 millions d'années (et ça continue de manière exponentielle à mesure que j'écris ces lignes..)... Eric Sadin met donc en rapport technique et éthique pour renvoyer dos à dos technophiles (l'émerveillement brouille le regard) et technophobes (pour critiquer une chose, encore faut-il savoir s'en servir, l'éprouver), en partant de l'expérience sensible : un travail philosophique de tout premier ordre.
Sa lecture en est dès maintenant absolument indispensable, ne serait-ce que pour savoir dans quel monde nous vivons -et vivront nos enfants.