Japonaises, la révolution douce

En nous faisant découvrir par le menu, thème après thème, détail après détail, la nouvelle vie des femmes japonaises, c'est un magnifique portrait du Japon effervescent et instable aujourd'hui que nous offre Anne Garrigue. Pour décrire une société, il faut peindre avec un petit pinceau. La leçon est ici appliquée. C'est même cet enchaînement minutieux de saynètes emblématiques, brèves interviews, portraits modestes, descriptions ou évocations sans pathos, qui me semble faire la réussite de ce travail. Au lecteur non spécialiste, à l'observateur du dehors, il permettra de saisir la nature exacte de cet indéfinissable ébranlement historique qui, année après année, accouche d'un nouveau Japon. Aspiration à l'individualisme, refus des contraintes disciplinaires du passé, goût du plaisir et de la liberté, exigences nouvelles en matière amoureuse ou conjugale, menaces nouvelles liées au fameux éclatement de la " bulle ", occidentalisation irrésistible des moeurs, créativité " scandaleuse " de la littérature et du cinéma. Dans toutes ces révolutions minuscules et enchevêtrées, les femmes du nouveau Japon, on le verra, jouent le premier rôle. Intrépides amazones du quotidien, elles chevauchent en vérité la grande Histoire. Et c'est parce que, de cette chevauchée primordiale, elles assument, par avance, les promesses comme les menaces que ces Japonaises du XXe siècle nous épatent.