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Tout est vanité et pâture de vent, dit l'Ecclésiaste. Rien de nouveau sous le soleil, toujours la même histoire, la même rengaine, le même drame qui se joue. Toujours la stupeur de vivre, la mort, l'amour, la toute-puissance du désir, la fulgurance de l'instant, l'immanence des présences, la joie et le désarroi, la grandeur et les faiblesses du coeur humain, la folle sarabande des terreurs enfantines, la présence des fantômes, la détresse et l'espoir, la rage et la fureur toujours tenaces malgré l'écoulement irrépressible du temps.
Pâture de vent est une célébration, un chant d'amour halluciné, une sorte de danse macabre fiévreuse et envoûtante ponctuée d'éclats lumineux et de moments de grâce. On y croisera les figures du grand-père, de la mère, du petit frère mort-né, d'un ancêtre rital exilé devenu président, et bien d'autres encore. On y entendra aussi, nécessairement, la voix des morts, faisant choeur avec celle des vivants, pour tenter modestement de rendre justice à l'intensité des événements et, peut-être, d'attester de frêles épiphanies.
Pâture de vent
C'est l'histoire familiale poussée comme un grand soupir aux profondeurs abyssales, une exhalaison qui d'un coup de vers fait surgir les morts et les vivants. Car il est bien question de ça : des morts et des vivants, de notre rapport avec les morts et les vivants, avec les squelettes et la chair.
C'est l'histoire d'un gamin, pétrit de terreurs nocturnes, de puissants désirs, au petit-frère mort-né, c'est le visage de la mère iconique, et le visage du monde aux pages noires.
Christophe Manon, de par sa langue d'une poésie arrachée, d'une emphase aux atours bibliques, nous ouvre les portes d'un univers désorienté, vampirisé par les démons d'une conscience fragile, scarifié par l'empreinte que laissent l'histoire et les histoires.
Il rôde dans ce roman des relents de tragédie, d'odyssée funeste. Les corps désaffectés ont tous leur mot à dire et leur rôle à jouer, il y rôde des âmes incarcérées dans le giron de la matrice, des folies monstrueuses et des lumières chapardées au néant.
L'antre du diable doit ressembler à ça, quand les dieux ont vidé les lieux du monde.
Une poésie incroyable et si belle, une écriture au lyrisme étourdissant qui saisit dès les premières phrases par sa force et son mouvement ! Le sentiment de se dire que l'on a fait l'expérience d'une lecture hors-normes.
Le sentiment de se dire que l'on a fait l'expérience d'une lecture hors-normes, et que l'écrivain nous a dit tant de choses sur nous, sur notre place dans l'histoire, sur la place de l'univers dans notre monde.