Si je vous dis que roman est une suite ininterrompue de mails, ça ne va pas vous donner envie de le lire ! Ouvrez-le. Tous les ingrédients d’une bonne histoire sont dedans. Une intrigue, des personnages et on se prend immédiatement au jeu.
Pierre-Marie Sotto est un écrivain célèbre. Un matin, il retire une épaisse enveloppe de sa boîte aux lettres. C’est un manuscrit. Certains lecteurs débusquent son adresse et lui expédient leur prose. Pierre-Marie ne lit jamais les manuscrits, ce n’est pas son travail, il les retourne. Et encore, il s’estime bien poli !Dans ce cas précis, il dispose juste d’une adresse mail alors il écrit. Son interlocutrice se nomme Adeline Parmelan et Pierre-Marie réclame son adresse postale afin de lui renvoyer son enveloppe. Adeline répond et insiste. Cette enveloppe est pour lui, il doit l’ouvrir. Quelque chose dans le ton et dans l’attitude de la jeune femme indispose le romancier, il craint un chantage.
Il range l’enveloppe. Ni détruite, ni renvoyée, ni ouverte. Il la lorgne.
Et comme Adeline a semé des graines de curiosité, il entame une correspondance avec elle.
Il raconte. Ses quatre mariages, sa kyrielle d’enfants, et cet ulcère qui l’empêche de vivre depuis deux ans et demi. Vera, sa dernière épouse a disparu du jour au lendemain. Sans laisser de traces, sans un mot. Elle n’a plus donné signe de vie. Cette plaie ne se referme pas et depuis, le romancier fonctionne au ralentit.
Le lecteur profite aussi des mails que Pierre-Marie envoie à sa famille, à son éditeur et à ses amis. Une galerie de personnages surgit. Une histoire pousse. Le lecteur rit, s’attache, s’émeut et se scandalise des mensonges éhontés de Pierre-Marie.
L’enveloppe l’intrigue, lui fait de l’œil et voila maintenant qu’Adeline le supplie de ne plus l’ouvrir. Leur correspondance s’est étoffée, elle a pris un ton badin et le romancier isole des incohérences. Ce créateur d’histoires détecte une chimère derrière le personnage d’Adeline. Serait-elle Vera ?
Pierre-Marie s’affole. Il envoie ses meilleurs amis vérifier les dires et l’existence de cette femme. L’enveloppe l’attire irrésistiblement. Une nuit, il la prend, la palpe et comprend son erreur. Ce n’est pas un manuscrit mais des courriers. Deux paquets distincts, une quarantaine de lettres.
Ce livre est détonnant. Il pétille. Les deux auteurs se sont amusés à s’envoyer des mails. Une fiction a grandit au gré de leur fantaisie et ils l’ont hiérarchisée ensuite.
À classer parmi les livres qui font du bien.
Annick FERRANT
Si je vous dis que roman est une suite ininterrompue de mails, ça ne va pas vous donner envie de le lire ! Ouvrez-le. Tous les ingrédients d’une bonne histoire sont dedans. Une intrigue, des personnages et on se prend immédiatement au jeu.
Pierre-Marie Sotto est un écrivain célèbre. Un matin, il retire une épaisse enveloppe de sa boîte aux lettres. C’est un manuscrit. Certains lecteurs débusquent son adresse et lui expédient leur prose. Pierre-Marie ne lit jamais les manuscrits, ce n’est pas son travail, il les retourne. Et encore, il s’estime bien poli !Dans ce cas précis, il dispose juste d’une adresse mail alors il écrit. Son interlocutrice se nomme Adeline Parmelan et Pierre-Marie réclame son adresse postale afin de lui renvoyer son enveloppe. Adeline répond et insiste. Cette enveloppe est pour lui, il doit l’ouvrir. Quelque chose dans le ton et dans l’attitude de la jeune femme indispose le romancier, il craint un chantage.
Il range l’enveloppe. Ni détruite, ni renvoyée, ni ouverte. Il la lorgne.
Et comme Adeline a semé des graines de curiosité, il entame une correspondance avec elle.
Il raconte. Ses quatre mariages, sa kyrielle d’enfants, et cet ulcère qui l’empêche de vivre depuis deux ans et demi. Vera, sa dernière épouse a disparu du jour au lendemain. Sans laisser de traces, sans un mot. Elle n’a plus donné signe de vie. Cette plaie ne se referme pas et depuis, le romancier fonctionne au ralentit.
Le lecteur profite aussi des mails que Pierre-Marie envoie à sa famille, à son éditeur et à ses amis. Une galerie de personnages surgit. Une histoire pousse. Le lecteur rit, s’attache, s’émeut et se scandalise des mensonges éhontés de Pierre-Marie.
L’enveloppe l’intrigue, lui fait de l’œil et voila maintenant qu’Adeline le supplie de ne plus l’ouvrir. Leur correspondance s’est étoffée, elle a pris un ton badin et le romancier isole des incohérences. Ce créateur d’histoires détecte une chimère derrière le personnage d’Adeline. Serait-elle Vera ?
Pierre-Marie s’affole. Il envoie ses meilleurs amis vérifier les dires et l’existence de cette femme. L’enveloppe l’attire irrésistiblement. Une nuit, il la prend, la palpe et comprend son erreur. Ce n’est pas un manuscrit mais des courriers. Deux paquets distincts, une quarantaine de lettres.
Ce livre est détonnant. Il pétille. Les deux auteurs se sont amusés à s’envoyer des mails. Une fiction a grandit au gré de leur fantaisie et ils l’ont hiérarchisée ensuite.
À classer parmi les livres qui font du bien.
Annick FERRANT