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"Mon père s'est tué d'une balle dans la bouche le 11 mars 2008. Il avait soixante-dix ans passés. J'ai calculé qu'il m'avait adopté trente-huit ans plus tôt, un jour enneigé de février 1970. Toutes ces années, nous nous sommes aimés jusque dans nos différences. Il m'a donné son nom, m'a transmis sa joie de vivre, ses histoires de soleil, beaucoup de sa force et aussi une longue nostalgie de sa Tunisie natale.
En exerçant son métier de kinésithérapeute, il travaillait "à l'ancienne", ne s'exprimait qu'avec les mains, au besoin par le regard. Il était courageux, volontaire, mais secret : il préféra toujours le silence aux paroles, y compris à l'instant ultime où s'affirma sa liberté, sans explication. "Ce sont les mots qu'ils n'ont pas dits qui font les morts si lourds dans leur cercueil", écrivit un jour Montherlant.
Mais il me laissa quand même mes mots à moi, son fils vivant, et ces quelques pages pour lui dire combien je reste encore avec lui." Eric Fottorino.
Une fin malheureuse
"Le 11 mars 2008 en fin de journée, dans un quartier nord de la Rochelle, mon père s'est tué d'un coup de carabine". Ca commence comme ça, le récit d'un père et d'un geste qui laissa une question. C'est le récit d'un homme soleil pour lequel on imaginait sans doute une autre fin? Le récit d'une paternité extraordinaire, d'un héritage profond et singulier, l'origine d'un nom qu'on porte parfois comme un talisman. Le lourd a gagné. On ne peut s'imaginer parfois que son père vivant alors il faut chercher les mots, les signes, les lieux pour continuer le dialogue, renouer avec sa présence, lui être fidèle, dire le père magnifique qu'il a été, le père providentiel. Une obsession filiale, un deuil qui se vit dans les gestes, dans les apprentissages. Récit d'un homme qui appris à ses enfants à se tenir debout, toujours libre et tenace contre un vent contraire. Bouleversant.