Si vous n'avez pas lu ce livre et que mon coup de coeur vous donne envie, ne lisez que le minimum car moins on en sait, plus on est prêt à se laisser "cueillir" par ce roman. Je ne suis pas prête de l'oublier et je vous le conseille chaudement si vous n'avez pas peur d'être un peu secouée, voire choquée (moi qui croyait qu'Auster était un auteur plan-plan). J'ai lu ce roman il y a plus d'un mois et je le trouve toujours aussi fort. Cela débute en douceur jusqu'à la page 100 environ où tout bascule. On sent qu'on va franchir le limite mais on se dit, non, il ne va pas oser. Et il ose.
J'ai lu la critique d'une blogueuse qui disait qu'elle n'avait pas trouvé ce roman sulfureux. Ah bon? C'est le roman le plus sulfureux que j'ai lu ces dernières années et pourtant, je n'ai pas été choquée. Et si ces cinquante pages sont très fortes et qu'il est difficile de les oublier, elles ne suffisent pas à faire de ce roman mon coup de coeur. Auster pose la question essentielle dans ce roman de la frontière entre la fiction et la réalité, une question que je me pose dès que le roman paraît trop personnel, avec l'impression que l'auteur ne respecte pas l'intimité de son entourage qui n'a pas choisi de partager sa vie avec le public. Et cerise sur le gâteau, le jeu de la narration(première, deuxième, troisième personne) est parfait et jamais fortuit. La scène sulfureuse ne pouvait pas être écrite à la première personne. Bien sûr, certaines scènes à Paris, notamment dans les cafés, font très clichés mais je me demande si ce n'est pas voulu. On finit ce roman sans les réponses et peu importe car ici, ce sont les questions qui importent. La jeune Cécile qu'"utilise" Adam m'a rappelée Cécile Volanges des Liaisons Dangereuses (sauf qu'ici, il n'y a pas d'unititation au sexe), je ne sais pas si le choix du prénom est un hasard. Je me demande si j'aurais aimé ce roman si j'avais un frère, si j'aurais été davantage gênée. Peut-être aussi que le lire dans une langue qui n'est pas ma langue natale m'a permis de mettre un peu de distance entre la situation et moi. Pour résumer, je dirais juste que ce roman fut un vrai choc.
Invinsible
1967 sur le campus de l’université de Columbia, Adam Walker jeune étudiant en littérature fait la connaissance de Rudolf Born , un enseignant français.
De cette rencontre va naître un bouleversement dans le vie du jeune homme qu’il se propose de nous raconter. Seulement voilà, dans la deuxième partie le narrateur change tout comme la portée de ce qui nous est conté ici. Adam Walker laisse la place à un de ses anciens amis de fac, devenu un auteur reconnu, à qui il a confié le manuscrit de cette fameuse année 1967. Après l’intervention de Jim, le roman passe du “je” au “tu” puis du “tu” au “il”. Car finalement ce roman est avant tout l’histoire d’un livre. Un livre qu’Adam Walker a décidé d’écrire mais qu’il n’a pu achever faute de temps.
Ainsi, Invisible est un constant va et vient entre 2007 (année ou son ami raconte l’histoire) et 1967, joue entre fiction et réalité, entre fantasmes, rêves et réalités.
On retrouve ici encore, les thèmes chers à Paul Auster. Bref, il s’agit une fois encore d’un roman plein de surprises, prenant et rondement mené. Même si je pense qu’il ne me restera pas au final grand chose de cette histoire d’ici quelques mois. C’est un bon Paul Auster mais peut-être pas son meilleur selon moi.