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La modernité tardive, qui révoque en doute la plupart des vérités et croyances héritées du passé, s'attache à sauver une seule certitude : celle de la dignité de l'homme singulier, fondement des droits de l'homme. Pourtant, elle poursuit la dépersonnalisation qui se trouvait déjà à l'ouvre dans les idéologies précédentes. Cette contradiction est l'objet même de ce livre : pourrons-nous garantir longtemps la dignité personnelle sans protéger du même élan le sujet personne qui en constitue le support et la raison d'être ? Le sujet personne est une entité singulière et insondable, pendant que nous le réduisons à ses collectifs identitaires.
Il est responsable de son propre destin, pendant que notre indifférence éducative le prive de l'apprentissage à l'autonomie. ll se grandit par l'indépendance d'esprit, pendant que la société contemporaine le livre à l'opinion dominante. Il est engagé dans l'éthique par ses actes, pendant que la société spectaculaire promeut une éthique de l'intention, verbale et dérisoire. Il est habité à la fois par le bien et par le mal, pendant que nous continuons d'entretenir les tentations manichéennes.
Il n'est ni réductible à sa biologie - ce qu'indique l'idéologie de la santé -, ni nourri par la seule matière - ce qu'indique la religion de l'économie. Il est doté d'un esprit singulier, exposé à la recherche spirituelle et à la quête d'éternité, alors qu'un nouveau panthéisme travaille à le dissoudre. Il ne suffit pas de clamer les droits de l'homme de façon incantatoire ; faut-il encore savoir qui est cet homme à respecter.