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J'ai découvert Jonathan Munoz avec « Un léger Bruit dans le moteur », une bande-dessinée dérangeante qui m'a glacée jusqu'au sang. C'est donc avec un peu d'appréhension que j'ai entamé celle-ci. Le dessin de Munoz étant magnifique, je ne pouvais pas passer à coté, alors je me suis précipitée dessus et... j'ai aimé. Il est beaucoup moins... morbide que « Un léger Bruit dans le moteur » !
C'est l'histoire d'un homme (Jean) à la chevelure et à la barbe hirsutes et d'un roux flamboyant, insomniaque et amnésique qui erre pendant des mois afin de réussir à trouver la tranquillité
de l'âme à laquelle il aspire tant. Il ne sait pas qui il est, il ne sait pas où il va, il se connaît pas les origines de ses insomnies, il veut juste trouve le repos. Il arrive dans un lieu en retrait du monde et de la réalité, qui semble calme et idéal, mais les habitants vont se révéler peu accueillants. Voulant partir et continuer sa route ailleurs, il est arrêté par le chute du pont, la seule issue pour sortir de « Bouddumonde ». Bloqué dans cet endroit étrange pour une durée indéterminé, il va devoir cohabiter avec les habitants du lieu. Il va y faire la rencontre de Dorine, une jeune fille dont la seule présence endort (au sens strictement littéral du terme) tout le monde autour d'elle. Souffrant ainsi d'une immense solitude, c'est avec bonheur qu'elle va constater que cet homme - insomniaque ! - ne sombre pas dans un profond sommeil dès qu'il se trouve à ses cotés. Ces deux êtres perdus, solitaires et malheureux vont se trouver, s'apprivoiser, se réconforter, et vivre une relation hors du temps et hors du commun dans un univers sombre et étrange. Jusqu'à ce qu'un concours de circonstances amènent Jean à comprendre qui il est, et ce qui lui est arrivé par le passé...
Sombre, mystérieuse, surprenante, décalée, tendre et drôle, cette bande-dessinée est une petite pépite, qui joue subtilement avec toute une palette de sujets et d'émotions ! Quant au graphisme, onirique et envoûtant, il nous plonge dans des ambiances aux couleurs marquées (avec une dominante ocre et bleue), nous transporte sur cette île coupée du monde et à l'atmosphère pesante.
http://www.livressedesmots.com/?p=2348
A l’école, Ernest n’arrête pas d’embêter Salomé. Quand la petite s’en plaint chez elle, sa maman lui répond que Ernest avait « sûrement voulu jouer avec Salomé, mais qu’il ne savait pas comment le lui demander », et que « sans doute, Ernest voulait être l’amoureux de Salomé ».
S’ensuit alors, à l’école, une discussion animée entre les enfants afin de comprendre ce que « amoureux » signifie. Chacun y va de son petit commentaire et présente sa définition de l’Amour. Ainsi ils réfléchissent tous et font avancer le débat ensemble. Ce sont des enfants qui discutent
entre eux, par conséquent l’auteur a pris le parti de rédiger cet album dans un langage enfantin, ce qui donne une touche d’innocence, d’insouciance et de légèreté au texte. Mais c’est aussi un petit récit plein de poésie et de tendresse, qui le rend touchant, émouvant. Il est également didactique car il permet d’aborder la notion d’Amour avec les enfants de façon ludique et de leur apprendre les bases d’une conversation (quelqu’un soumet une idée, on y réfléchit et on y répond, chacun son tour, ainsi la discussion progresse).
C’est un album très mignon et agréable, doté de beaucoup d’humour, de facétie et de touches fantaisistes, notamment au niveau du texte (qui possède différentes tailles et prend parfois la forme de petits calligrammes) et des jeux de mots qui parsèment l’histoire. En effet, il s’avère que les petits ont du mal à comprendre les métaphores des grands (que veut dire « tomber à Moureu » ? « Coude-foudre » ?). Toutes ces subtilités traduisent bien la complexité du concept de l’Amour.
Enfin, je conclurais en disant que le texte et les illustrations se marient à la perfection. La richesse des dessins, son grand nombre de détails et ses couleurs vives illustrent impeccablement le sentiment amoureux et ses nombreuses subtilités.
http://www.livressedesmots.com/?p=1863
« Princesses oubliées ou inconnues », écrit par Philippe Lechermeier et illustré par Rebecca Dautremer, est un livre objet magnifique et très soigné, à mettre entre les mains de toutes les petites filles, dès six ans ! Elles n'y trouveront que quelques références seulement à leurs princesses favorites, connues de tous (La Belle au Bois Dormant, Cendrillon, et compagnie...), car le but de ce livre fantaisiste est d'ouvrir une porte vers l'inconnu, l'étrange et l'absurde et il se veut décalé, original. En effet, sur un ton humoristique mais non dénué de poésie, il dresse des
portraits approfondis de princesses (leurs généalogies, leurs familles, leurs goûts, leurs personnalités...) telles que « La Princesse de la molle », « La Princesse de Fasola », « La Princesse von Badaboum », « La Princesse de Pêtsec », « La Princesse Mathûvû », et tant d'autres encore...
Citations, définitions, petits documentaires, fantaisie typographiques, croquis et dossier complémentaire (avec guide pratique, test, proverbes, lexique...) parsèment cette œuvre riche et diversifiée. On pénètre dans un univers différent à chaque double page, on est immergé dans l'ambiance qui en découle. Variété, fantaisie et multiplications de détails insolites sont sa force et sa richesse. On peut rester plongé pendant des heures dans cette œuvre captivante, à en admirer chaque page, chaque détail, chaque nuance, chaque subtilité.
Venons en au travail de titan réalisé par Rebecca Dautremer : ses illustrations, il ne faut pas se contenter de les regarder en photo, car elles perdent considérablement de leur splendeur ! Il faut ouvrir le livre et les contempler sans écran entre l'œil et les dessins. Car ce qui se trouve sous nos yeux s'anime et prend vie. Beaucoup de couleurs et de teintes splendides, de nuances, de mélanges, de dégradés parfaitement maîtrisés, et des mouvements aux rendus extraordinaires. Rebecca Dautremer a un talent époustouflant, un génie à couper le souffle et se positionne ainsi parmi les illustrateurs les plus doués de son temps.
http://www.livressedesmots.com/?p=1856
Cette histoire se déroule à Venise. Elle met en scène Arlequin, un jeune homme doté de grandes oreilles ridicules, qui font de lui l'objet de quolibets et de railleries. Mais Arlequin est pourvu d'un don rare. Il possède l'Oreille Absolue. Il a une ouïe extraordinaire, entend tout, jusqu'aux sons et bruits les plus ténus, les plus infimes. Il est donc logiquement l'accordeur officiel de Venise, celui de toute la population, des plus démunis aux plus riches, et exerce son métier avec générosité, art et passion. Un jour, un riche marchand de Venise le fait venir dans son somptueux palais.
Il a une demande très particulière à soumettre à Arlequin, et le met face à un défi difficile de la plus haute importance. En effet, ce dernier va lui demander d'accorder... Colombine, qui n'est autre que sa fille, dépressive et muette depuis deux ans et qui se voue corps et âme à la peinture. Après tout, il est capable de redonner la voix à des pianos usés, alors pourquoi pas à sa fille ?
Arlequin va alors faire preuve de beaucoup de compréhension, de douceur et d'empathie à l'égard de cette jeune fille en détresse. Il ressent sa solitude et sa tristesse, engendrées par sa vie de petite fille riche, entourée de luxe, mais qui manque cruellement... d'Amour. Amour qu'elle va trouver en la personne d'Arlequin, car ils comprennent, ensemble, que leurs cœurs sont accordés.
Une magnifique fable écrite par Hubert Ben Kemoun, qui mêle avec finesse musique, passion et sentiments amoureux, accompagnée d'illustrations magnifiques et très expressives. Chaque double page est un tableau somptueux, plein de couleurs pastels, de délicatesse et de douceur, qui nous plonge au cœur de Venise et de la musique. Une merveille pour les yeux et pour le cœur.
http://www.livressedesmots.com/?p=1840
Célestin, muni de son long manteau coloré, de son bâton et de son sac, parcourt les chemins, à la recherche de chagrins, de soucis, de malheurs à ramasser afin d'alléger et d'embellir le monde. A l'aide de son bâton, il pique et ramasse des mouchoirs de toutes sortes, mouillés, imbibés de larmes. Puis lorsqu'il a terminé, il range tous ces sacs de misère dans sa maison, la remplissant ainsi du sol au plafond. Mais à force d'accomplir sa morne tâche, de s'entourer des chagrins et de la tristesse du monde, un nuage gris s'installe durablement en Célestin, et enfle jusqu'à devenir
un gros nuage noir dont il ne parvient pas à se débarrasser. Accablé, il va devoir trouver une solution pour ne pas sombrer dans le désespoir. Remettre les mouchoirs en liberté ? Pas question ! Alors, une idée germe… Pourquoi ne pas les laver ? Alors, tandis qu'ils sèchent, le vent les emporte et les transforme en… jolis papillons !
Le texte de Sylvie Poillevé est poétique ; il éveille l'imaginaire et stimule l'esprit des petits. Cet album aux couleurs vives est, comme toujours, magnifiquement illustré par Mayalen Goust (que je ne présente plus), qui fait, une fois de plus, preuve d'un grand talent. Au départ, les illustrations sont chatoyantes et chaudes, puis deviennent plus sombres, plus grises au fur et à mesure que Célestin s'enfonce dans la déprime. Pour finalement retrouver leur éclat à la fin de l'album, une fois Célestin débarrassé de sa tristesse.
C'est un album magique et harmonieux qui apprend à gérer les chagrins ! Dans des tonalités essentiellement chaleureuses (dominantes Jaune, Orange, Rouge…), cet album est une fable poétique qui illustre la quête du bonheur et la joie de vivre. Il efface les chagrins et rend le sourire, aux petits comme aux grands !
http://www.livressedesmots.com/?p=1835
Ce petit album délicieux et poétique est un immense coup de cœur pour moi, un de mes albums préférés et Mayalen Goust y est pour beaucoup, car je trouve que dans ce petit bijou elle s’est surpassée ! Ses illustrations épousent à merveille les jolies phrases d’Agnès De Lestrade, qui appréhende finement le monde des adultes vu par un enfant. En effet, cet album traduit avec beaucoup de justesse et de subtilité le regard innocent et insouciant qu’une enfant pose sur l’univers des adultes, auquel appartiennent ses parents. Il exprime son ressenti vis à vis de cet univers étrange,
immense et impressionnant, composé de personnes très grandes, bruyantes, souvent occupées, pressées, mais aussi rêveuses, tendres, attachantes et aimantes.
On sent aisément tout le bonheur dans lequel évolue cette famille. C’est une ode à l’Amour, à l’émerveillement et l’admiration que les enfants éprouvent pour leurs parents, ces grands, ces géants qui les aiment, les protègent et les aident à grandir. Beaucoup d’émotion ressort de ce petit album et il touchera la corde sensible des petits comme des plus grands. De plus, il est intégralement composé de vers, il permet aux enfants d’aborder la poésie et la façon dont elle se compose de façon agréable et ludique.
Toujours dans le style propre à Mayalen Goust, c’est-à-dire avec beaucoup de couleurs claires, de teintes pastelles, de courbes élégantes, avec beaucoup de grâce et de pureté, les illustrations sont très imagées, intenses et poétiques. Elles confèrent à l’album une riche puissance d’évocation qui suscite l’engouement, l’intérêt, et ravit les yeux.
http://www.livressedesmots.com/?p=1822
Il s’agit d’une petite fable adorable pleine de poésie, qui parle d’amour, et qui s’intéresse à la thématique du sommeil et à la difficulté à « trouver le sommeil ».
En effet, un matin, une petite fille entend sa maman dire à son papa qu’elle est « fatiguée, car elle n’a pas pu trouver le sommeil cette nuit ». La petite fille décide donc, la nuit suivante, d’aider sa maman à dormir, et elle attend que le sommeil arrive afin de le mener dans la chambre de sa maman. Mais il ne vient pas, alors elle décide de partir explorer la maison à sa recherche. Elle passe par
la salon, mais il n’est pas là, elle poursuit avec la cuisine, la buanderie, la salle de bain, et elle arrive même à vaincre sa peur du grenier en allant l’examiner aussi… Mais le sommeil reste introuvable. Elle continue de fouiller la maison, et au moment où elle se décide à sortir chercher dans le jardin, le voilà qui vient « doucement se poser sur ses paupières ». Alors elle le mène dans la chambre de sa maman, et ces aventures l’ont tellement épuisée qu’elle s’endort dans le lit avec ses parents, jusqu’au petit matin.
Cette petite histoire est accompagnée d’illustrations riches en couleurs et lumineuses, très douces et pleine de tendresse. Elles sont pleines de subtilités, tout en arrondis et en souplesse, leur harmonie, leur finesse et leur délicatesse créent un univers propre à l’histoire et envoûtent, entraînent l’enfant dans un univers onirique et poétique.
http://www.livressedesmots.com/?p=1789
Ce roman est le livre que j'aurais aimé écrire ! C'est l'histoire d'une rencontre improbable entre un jeune étudiant en lettres modernes, qui quitte sa famille et sa région d'origine pour faire ses études à Paris, qui commence sa vie, et un vieil écrivain, oublié, honni du monde littéraire, qui s'achemine doucement vers la fin de sa vie. Forcés de cohabiter, après s'être ignorés pendant plusieurs mois, ils vont se découvrir peu à peu, partager leur passion commune pour la littérature, se confier l'un à l'autre et devenir amis. Un beau roman d'apprentissage, humaniste, qui emporte et atteint la sensibilité de son lecteur.
Très bon roman pour les jeunes
Après la superbe lecture qu'a été pour moi « La Fille Seule dans le vestiaire des garçons », de Hubert Ben Kemoun, j'ai décidé de récidiver quand je suis tombée sur « Blues en noir », du même auteur. Grand bien m'en a pris ! Sans être transcendante, j'ai trouvé cette lecture aussi intelligente et aussi bien menée que « La Fille Seule dans le vestiaire des garçons ». L'auteur a une écriture qui me charme ! Incisive, ironique, brutale par moment, et surprenante ! Il ne mâche pas ses mots, et, grâce à son écriture imagée et précise, il va au cœur des sentiments, des émotions et tout sonne juste.
Benjamin, le narrateur, est un jeune homme passionné de musique, un talentueux compositeur et parolier, il est ambitieux, et rêve de faire carrière dans cette branche. Pour son plus grand malheur, il est aussi idéaliste, rêveur et naïf. Lors d'un concours, alors qu'il vient de faire un tabac sur scène, il va rencontrer un producteur. Ce dernier, très encourageant, va lui mettre des rêves plein la tête et le cœur. Mais le monde de la scène appartient aux requins, à ceux qui n'hésitent pas à abuser et à profiter du Talent, de la Jeunesse et de l'Innocence, et Benjamin va en faire rapidement les frais, être humilié de la plus cruelle des façons.
Je vous avouerai que dès le départ, j'ai compris où le récit se dirigeait. Je pense que le but de l'intrigue n'est pas de nous étonner avec de magistrales révélations, néanmoins, j'ai été surprise de la façon dont l'auteur amène les évènements et conduit son récit. La narration, astucieuse et grandiose, fait progressivement monter la tension, en alternant plusieurs points de vue et plusieurs moments différents de l'histoire, tout en restant claire et limpide. Hubert Ben Kemoun parle avec sincérité, profondeur et lucidité de sentiments forts, tels que l'envie, l'espoir, la déception, l'humiliation et la rage.
Autant la fin de « La Fille Seule dans le vestiaire des garçons » m'a quelque peu déçue, autant la fin de « Blues en noir » est un coup de génie ! Je craignais encore la Happy-End trop facile, mais que nenni ! Elle est surprenante, imprévisible, à la fois comique et tragique, c'est un condensé d'émotions intenses et contradictoires qui m'a laissée pantoise et ravie !
Un court roman, percutant, perspicace et émouvant, à coté duquel il ne faut pas passer si l'occasion se présente.
http://www.livressedesmots.com/?p=2480