Problèmes économiques N° 2/909

Au sein d'une économie mondialisée, dans laquelle les frontières s'effacent peu à peu tandis que les coûts de transport diminuent, les délocalisations sont inévitables. Le transfert d'activités à l'étranger fait l'objet de nombreuses études notamment dans le champ de l'économie géographique mais aussi en sciences managériales. La plupart d'entre elles, comme celle de David L. Levy, publiée dans le Journal of Management Studies, centrent essentiellement leur analyse sur la question du coût du travail.
L'économie réalisée et la création de richesse engendrées par ce transfert d'activités à l'étranger ne profitent en fin de compte, selon l'auteur, ni à la nation d'origine ni aux salariés, mais plutôt aux actionnaires. Dans une enquête menée cinq années durant auprès de 500 entreprises dans le monde, dont Michel Drancourt fait le compte rendu dans Futuribles, Suzanne Berger montre de son côté que si les délocalisations ont pour seul motif la recherche d'un gain en termes de coût salarial, elles se révèlent souvent décevantes.
Son étude insiste également sur le fait que l'essentiel de la sous-traitante est toujours réalisé en Occident. Le coût du travail n'est en effet pas le seul déterminant des délocalisations, précise encore Suzanne Berger dans un entretien à La Vie des Idées. Celui-ci ne s'impose comme déterminant décisif qu'une fois tous les autres facteurs réunis. Jean-Louis Mucchielli et Florence Puech soulignent en effet dans Economie et Statistique que le choix du lieu d'implantation de l'entreprise va autant dépendre des " effets d'agglomération " que du niveau des salaires dans le pays hôte ainsi que du potentiel marchand.
La preuve n'en est-elle pas le récent et nouveau phénomène de " relocalisation " ? Ainsi, si la culture et la nationalité de l'entreprise, comme le rappelle Claude Serfati dans la Revue internationale et stratégique, tendent à prendre de plus en plus d'importance, la notion de territoire compte paradoxalement davantage dans un " monde Lego " où les processus de production sont disloqués.