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Si Charles Baudelaire tend aujourd'hui à incarner la poésie française, la marche vers la reconnaissance fut longue. Professeur au Collège de France, Antoine Compagnon dresse le portrait d'un " homme vulnérable ", " cultivant le paradoxe" et meurtri par la honte que lui infligea la condamnation en justice des Fleurs du Mal. Longtemps incomprise, mal jugée, son oeuvre occupe désormais la place d'honneur qu'elle mérite et, de sa " puissance de choc ", encore intacte, touche au coeur les jeunes générations.
Tout, chez Baudelaire, est d'une égale densité. Le choix des extraits d'oeuvres proposés dans ce numéro est simplement indicatif. D'autant qu'aux côtés des poèmes en vers, il fallait donner des extraits de l'oeuvre en prose, puiser dans la critique d'art, dans les textes sur Edgar Poe, dans Le Spleen de Paris. Notre choix veut aussi, à côté du poète, et en lui, faire apparaître un philosophe, un essayiste, un critique, un historien de l'art.
Spécialiste de la littérature française du XIXe siècle, André Guyaux retrace l'itinéraire de Baudelaire, un homme " singulier ", tant par sa personnalité que par son oeuvre. Héritier des traditions classiques et romantiques, il ouvrit une nouvelle voie par sa modernité et influença Rimbaud, Verlaine et Mallarmé, mais aussi des artistes, comme Edouard Manet ou Auguste Rodin. Les Fleurs du Mal ont fait exploser une polémique qui couvait depuis longtemps et la justice du second Empire l'a accusé de troubler l'ordre public.
Baudelaire est-il un romantique ? Un décadent ? Ou un dissident absolu, exilé de tous les territoires littéraires connus ? Comment définir son style ? D'une génération à l'autre, les lignes ont bougé. Baudelaire avait une pleine confiance dans le sort que la postérité lui réserverait. Il avait parfaitement raison.
