Cet ouvrage est un essai sur la rébellion zapatiste du 1er janvier 1994. Michael Löwy, directeur de recherches au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), nous dit que cet essai " est à la fois une œuvre de science sociale, d'histoire et de sociologie des religions ". L'auteur nous fait parcourir les couloirs de l'histoire mexicaine pour retrouver des " traces " constituant la genèse du néozapatisme, dont les racines remontent loin dans les siècles : dans les traditions culturelles précolombiennes, dans la guérilla guévariste des années soixante-dix, ainsi que dans la " Guerre des Dieux " des chrétiens, solidaires des indigènes - la " lignée croyante " qui va de Bartolomé de las Casas à l'évêque de San Cristobal Mgr Samuel Ruiz. Cette analyse démontre la " puissance créative de la Tradition " dans la modernité, une des questions essentielles de la sociologie des religions. En effet, les indigènes puisent dans leur histoire, dans leur culture ancestrale, dans leurs mythes, pour donner sens à leur vie et y trouvent les ressources de leur résistance à la " modernisation " néolibérale imposée par l'Etat. D'autre part, ce livre étudie le charisme du sous-commandant Marcos qui, à notre avis, résume, par sa pensée, marxisme, théologie, traditions commuautaires et imaginaire indigène) et son action (la parole et la communication) la force de la pérennité du mythe, de l'utopie et de l'espoir dans un renouveau de la marche de l'Histoire de cette fin du millénaire. Comme nous le fait remarquer Carlos Fuentes, le génie de l'indigénisme et de l'Armée zapatiste de libération nationale tient précisément dans cette vision moderne de l'Histoire en tant que tragédie, encore vivante dans " la force irréductible du Mythe ". En perdant " la liberté recherchée, à l'instar du Prométhée de l'Antiquité et du héros du Procès de Kafka ", la société civile affronte, au risque de la mort, la dictature et la corruption d'un parti au pouvoir depuis plus de soixante ans.