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Le capitalisme ne fait plus : il fait faire. L'économie de plateforme a conféré une dimension paradigmatique à l'usage de l'externalisation, ainsi qu'une place inédite aux activités gratuites. D'où la nécessité d'analyser les nouveaux régimes d'exploitation dans le secteur des services et de la culture sous l'angle de l'usage que le capitalisme fait du numérique. Dans cet ouvrage, Patrick Cingolani met en lumière les diverses formes que prend l'extraction du surtravail et la prédation du gratuit, de l'instillation du travail dans la vie privée à sa vaporisation dans les temporalités interstitielles du quotidien.
Le travail pénètre en effet désormais les pores de la vie ordinaire en effaçant ses indices et ses frontières. Parallèlement, on assiste à la spoliation spéculative des activités non-marchandes. Dans un monde où le temps d'activité gratuit est approprié par la contrainte ou par la promesse (stage ou projet) tandis que les travailleurs externalisés se trouvent assujettis à une temporalité juste-à-temps, tout moment devient une opportunité de prélèvement.
Mais si le "le travailleur" , voire "l'usager" , peut apparaitre abusé par l'effacement des indices de la subordination et des signes distinctifs du travail, rien ne serait pire que de désespérer d'une subjectivité donnée comme aliénée ou complice. Il importe plutôt de mener une critique rigoureuse de l'accountability qui s'intègre à une réflexion sur les formes de suspens et résistance démocratiques à opposer aux usages capitalistes de la technique, à l'instar des luttes menées par travailleurs de la mode à Milan ou par les coursiers de Deliveroo.