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La réflexion sur la langue et la volonté résolue de l'uniformiser se présentent sous une forme très cohérente pendant l'an II. Le projet linguistique est la clé de voûte d'un projet plus vaste d'uniformisation qui inclut également l'espace et le temps et qui a pour contre-poids les projets de musées. La visée de l'uniformité se base sur une série de programmes antérieurs aux Lumières. Il comble le vide symbolique engendré par la chute de l'Ancien Régime et s'oppose aux expériences vécues pendant la Révolution : oralité, diversité des langues et des significations, réduction par la voix et par les images.
Le projet linguistique a deux volets : l'uniformité du français et son universalisation au détriment du latin et des langues régionales. Ce deuxième aspect est mieux connu que le premier mais l'uniformisation précède nécessairement l'universalisation dans la pensée révolutionnaire. Après Thermidor, l'uniformisation de la langue est loin d'être abandonnée. La nouvelle élite intellectuelle des Idéologues, présente à l'institut National, à l'Ecole Normale et dans les Ecoles Centrales, formule une théorie philosophique conçue comme base d'une science unifiée, articulée autour de l'axe central d'une langue écrite, uniforme et univoque garantissant le progrès scientifique et social.
La théorie sémiotique et linguistique des Idéologues tombe rapidement en désuétude après les violentes attaques de Napoléon. Les Romantiques allemands, et surtout Humboldt, vont construire des théories linguistiques autour du concept de diversité, ouvertes aux voix et aux images. Il convient d'examiner la réalité linguistique de la fin du 20ème siècle dans l'optique des deux conceptions discutées en 1800.
S'il a fallu combattre la diversité menaçante par l'uniformisation durant la Révolution, faut-il aujourd'hui récupérer ce qu'il reste de diversité et l'opposer à une mondialisation uniformatrice ?
