La maison à droite de celle de ma grand-mère de Michaël Uras

- Il y a 5 ans
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La maison à droite de celle de ma grand-mere

Giacomo raconte son île


La maison a droite de celle de ma grand-mere de Michael Uras

Il y a des endroits oubliés du monde, des lieux de l’enfance dont on voudrait s’éloigner à tout prix. Sans toujours comprendre qu’ils sont en nous pour toujours. Comme les souvenirs. J’ai pris le bateau avec Giacomo pour l’accompagner dans son retour sur son île natale. Sa grand-mère est mourante, il faut se presser. Mais déjà sur la navette qui relie l’île au continent on sent toute sa réticence, sa résistance même. La vie a continué loin de l’enfance et se retrouver dans son village perdu n’est pas très agréable pour lui. Il doit se confronter au passé et l’île lui rappelle des détails d’évènements heureux et malheureux de sa vie.

Dans ce retour au bercail j’ai fait la connaissance des membres de la famille : la mama, autant par ses excès que par son amour débordant, envahissant, le père réservé, en retrait, que l’on aime sans le dire, l’oncle insupportable, il y en a toujours un, et la facétieuse grand-mère, on voudrait avoir la même, celle à qui l’on peut se confier sans jugement. Une famille ordinaire, qui ressemble à la nôtre. Une famille qu’il honnit et qu’il aime, aussi, presque malgré lui.

Il y a également l’ami de toujours qu’il retrouve, sans gêne, sans effort. Les personnages emblématiques de son enfance, l’épicière canon et l’entraîneur de football militaire décoré, qui ont vieilli, évidemment, projetant désormais des images écornées d’un idéal passé. J’ai fait aussi connaissance avec les personnages féminins entourant le personnage principal. L’ex-femme qui est comme une ombre permanente dans le coeur de Giacomo. Et la jolie doctoresse qui représente comme un espoir d’un avenir plus clément. Et puis il y a un autre personnage dont la présence grandit tout au long du roman et qui donne à celui-ci toute sa dimension. Mais chut, je ne vous en dirais pas plus, pour ne pas vous gâcher le plaisir de lire ce livre dans lequel Giacomo nous raconte son île, son passé, son présent. D’ailleurs, il se projette dans son travail qu’il a amené dans ses bagages, se débat avec lui pour ne pas avoir à se débattre avec ses sentiments. Et finalement, il reste sur ce caillou plus longtemps que prévu, presque sans s’en rendre compte, mais probablement pour mieux fuir le passé en étant englué dedans jusqu’au cou. L’on nie parfois l’évidence, pour se protéger, sans se rendre compte que l’on file droit devant dans le mur de la réalité. Giacomo nous parle de son métier, de sa famille, de ses amis et de ses amours avec des sentiments simples et justes qui nous touchent. Il est à la fois pathétique mais toujours vrai, un humain dans la tourmente de ses souvenirs, comme cela nous arrive parfois.


Un roman déroutant

Tous les personnages se mélangent dans une étrange farandole colorée, tels les dessins à la peinture délavée des murs du village. Ils évoquent tous un moment de vie, donnant des informations, projetant les images d’un univers bien défini, dans lequel l’on se retrouve sans difficulté. L’on a envie de suivre cette histoire, d’en connaître la chute. Alors, embarquez pour ce voyage en Sardaigne, faites la traversée jusqu’au village perdu dans la montagne, à la rencontre des personnages décrits avec justesse et humanité par Michaël Uras.

Vous en sortirez avec un sentiment mitigé, entre rires et larmes. Le final est surprenant, déroutant et donne une autre saveur au roman. L’auteur a su distiller son intrigue tout au long des pages, comme une ombre projetée, à la fois changeante et mouvante. On ne s’y attend pas vraiment et on a envie de recommencer pour suivre à nouveau le fil du narrateur. Une expérience à vivre cet été sur une plage ensoleillée...ou pas, mais avec intensité.

Gaëlle Hanser, pour le blog de Decitre.fr