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Des détenus descendent une rivière en canoë-kayak. L'opinion publique est heurtée. Heurtée, par cette présence des détenus dans la "place sociale". Heurtée car dans les représentations collectives, cette scène évoque l'idée que les conditions modernes de détention seraient trop souples pour être réellement punitives et dissuasives. Pourtant, une approche historique permet de constater que l'introduction des activités physiques et sportives en prison a d'abord été motivée par une logique disciplinaire.
Puis, avec le temps, la pratique du sport en détention est devenue un outil éducatif participant à la réinsertion des détenus. Mais l'accès aux activités sportives reste encore très limité en milieu carcéral. Pour bénéficier des formes les plus gratifiantes de pratique sportive, exercer un sport de compétition et bénéficier de permissions de sortir sportives, le profil pénal et sociodémographique des détenus doit répondre à des critères fort sélectifs.
Par ailleurs, les contraintes carcérales expliquent des taux d'abandon élevés. Comment dès lors concevoir ces activités comme un réel moyen de réinsertion ? La réponse est double. D'une part, en raison de leur capacité à fournir aux détenus l'opportunité de se constituer une "image pour soi" et de réactiver ce qui constituait une partie de leur identité sociale. D'autre part, en leur permettant d'apprendre à gérer - à partir de bases normatives communes - l'aspect stigmatisant de leur statut.
Le jeu de l'interaction sportive glisse alors progressivement vers celui de l'interaction sociale dans laquelle le détenu apprend à manier sa déficience identitaire pour, finalement, entrevoir l'espoir d'une humanisation possible...
