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Une des caractéristiques de la pensée contemporaine est l'importance du langage. Loin d'être le simple reflet de nos idées, il les façonne et les crée à bien des égards. S'il structure notre inconscient (Lacan) et nos mythes (Levi-Strauss) ou encore s'il est constitutif du fait que l'homme ait pu devenir objet de science à un moment décisif de la pensée occidentale (Foucault), alors la conclusion qui s'impose est qu'il est nécessaire d'étudier davantage que jamais le langage tel qu'il se présente en lui-même, par-delà ses multiples manifestations.
L'oeuvre de Oswald Ducrot est exemplaire à ce titre. Son nom est associé à ce qu'il est convenu d'appeler aujourd'hui la Nouvelle Linguistique. On est ici en présence d'une pensée qui a réussi à renouveler l'étude du langage et l'idée que l'on s'en faisait, au même titre que celle de Saussure ou de Chomsky. Par l'originalité de l'interrogation, par la force explicative qu'il apporte dans l'étude de phénomènes encore négligés ou peu systématisés par la linguistique traditionnelle, bien qu'omniprésents dans la langue et l'usage, cet ouvrage se présente à la fois comme une introduction et une synthèse.
Comment la langue fonctionne-t-elle pour suggérer et convaincre ? Comment marque-t-elle l'implicite à propos duquel elle argumente ? En d'autres termes, comment utilisons-nous, parfois à notre insu tellement le mécanisme imprègne les usages linguistiques les plus automatiques, ces opérateurs de conviction que sont, par exemple, "donc", "mais" ou "même" ? Ce sont à ces grandes questions que l'ouvrage s'efforce de répondre systématiquement en montrant qu'il y a un mécanisme général qui permet de renvoyer explicitement à l'implicite, de dire en réalité ce que l'on ne dit pas vraiment, et d'argumenter en faveur d'une conclusion qui se marque, et donc se remarque, en raison de lois internes et différenciées propres à l'usage même du langage.
