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Notre identité se trouve-t-elle liée à la langue que nous avons apprise dans l'enfance ? Celui qui, par choix ou par nécessité, quitte son pays devient-il pour autant différent ? L'imaginaire des langues explore les réponses que des écrivains donnent à ces questions : ceux qui, comme Samuel Beckett, passent d'une langue à l'autre ; les " transfuges " qui, comme Cioran abandonnent leur langue pour en adopter une nouvelle.
Pourquoi choisit-on une langue plutôt qu'une autre ? Et les écrivains étrangers qui décident d'écrire en français forment-ils un groupe particulier dans notre littérature ? Si l'on admet que tout écrivain est, par définition, étranger à la langue qu'il écrit, rien ne distingue monolingue et bilingue. Pour apprécier les œuvres, seule compte la " langue imaginaire " que chacun s'est forgée. Deux exemples éclairent cette hypothèse.
Celui de Claude Ollier d'abord, qui parvient à faire résonner l'arabe dans ses livres, tentant de renouer entre Islam et Occident un dialogue qu'une histoire difficile a souvent rompu. Celui de Cioran ensuite : c'est en conformant sa prose à une représentation somme toute fausse du français qu'il devient l'un des auteurs importants du XXe siècle. Si confronter ce que disent les écrivains de leur rapport aux langues conduit à conclure qu'il n'existe pas de vérité dans ce domaine mais des constructions imaginaires, au moins ces passeurs de fables nous indiquent-ils quelques-uns des chemins que nous pouvons emprunter.